Antoine s'est tu samedi à Montpellier, 83 ans. Rappel.

Etudiant à l'Idhec, j'avais été impressionné par l'audace d'Antoine Bonfanti lorsqu'il mixait un film. Il fait partie d'un trio de passeurs qui m'ouvrirent au monde du son comme je l'avais été à celui de la musique par Frank Zappa. Les deux autres sont Aimé Agnel, devenu psychanalyste, et le compositeur Michel Fano. Aimé développait la perception auditive, Fano inventa le concept de partition sonore. Avec Antoine, c'est la pratique vivante du métier qui me fascina. Lorsque nous lui apportâmes La nuit du Phoque à mixer, il demanda d'emblée si nous souhaitions le regarder une fois avant ou nous lancer directement ! Pas si étonnant venu du mixeur de Godard, Marker, Resnais... Évidemment, nous nous sommes jetés dans l'aventure comme si tout commençait là ! Et Antoine m'apprit à mixer avec les dix doigts d'une part, et d'autre part à ne pas avoir peur des mouvements brusques et radicaux. La frilosité des mixeurs m'a ensuite toujours agacé. Je trouvai en lui la validation de mes propres expériences, le goût du risque, la fascination de l'accident opportun, le swing du mix.
Antoine mixa alors presque tous mes films. Ces conseils pour la prise de son furent aussi précieux, et j'adhérai à ces choix, Nagra (le magnéto portable utilisé pendant des décennies au cinéma) et Beyer M160, un micro directionnel qui obligeait à faire des choix ! Le son est peu de choses qu'il faut savoir, mais entendre, écouter est une autre paire... de manches.

Merci à Dominique Greussay pour la photo qu'elle prit lors d'une fête à Iskra.