Orkhêstra distribue trop de bons disques (sans évoquer GRRR !).
La numéro 13 datée du 3 mai présente la réédition en cd remasterisé des Yeux fermés & Lifespan (Elision Fields) de Terry Riley, le premier répétitif révélé par In C, une pièce minimaliste dont l'instrumentation libre a permis une étonnante diversité d'interprétations. Le succès est venu avec Rainbow in Curved Air en 1969. Depuis vingt ans, il écrit essentiellement pour quatuor à cordes, avec la complicité privilégiée du Kronos Quartet. Le cd qui vient de paraître est la musique de deux films peu mémorables de 1972 et 74, réciproquement de Joël Santoni et Alexander Whitelaw. C'est du Riley variétoche, l'entendre en toute sympathie, car c'est plein de volutes de fumée hallucinogène, de boucles hypnotiques qui inspireront des groupes comme Soft Machine, d'orgue électronique, de piano, de saxophone soprano. Les instruments se tuilent en un délicieux mille-feuilles sucré à souhait qui fait tourner la tête. Jusqu'ici j'avais toujours pensé que c'était dans l'ordre inverse, le vertige suggérant la pâtisserie...
La musique de 48 Cameras, collectif implanté en Belgique, appartient à cette même famille des planeurs expérimentaux. Ils collaborent avec de nombreux invités par la voie des télécommunications. After all, isn’t tango the dance of the drunk man ? (Interzone) s'écoute facilement, allongé dans des coussins profonds.
Post-Minimalism rassemble 19 compositeurs de 4 pays en 2 cd (Trace). La musique répétitive a un jour été rebaptisée minimaliste sans que je m'en aperçoive, offrant un espace plus ouvert au retour à la tonalité, déployant un large éventail d'œuvres aux formes simplifiées, mais dont la variété s'expose ici dans un "post" qui n'exprime que l'émergence d'une troisième génération. La première a rendu célèbres Riley, Reich et Glass ; Adams et Bang on a Can appartiennent à la seconde. Quel mouvement lui répondra-t-il, comme eux-mêmes se révoltèrent en leur temps contre l'omniprésence des post-sériels ?
Enfin, les déçus du Volta de Björk pourront se rabattre sur Orphica du grec Mikhail (Q’mass), déclinaison réussie du mythe. Une voix haut perchée, des arrangements qui oscillent entre symphonie virtuelle et rythmiques électroniques ciselées à l'or fin, ce baroque helléniste suggère qu'une page est tournée et qu'il est peut-être temps de défricher de nouveaux paysages utopiques.

P.S. : j'évoquerai bientôt les deux disques distribués par Orkhêstra qui m'ont vraiment surpris, La musique de l'Afrique est en nous d'Alex Grillo (Césaré) et Didascalies de Luc Ferrari (Sub Rosa). À suivre.