Que l'on gravisse les marches ou que l'on s'enfonce dans l'obscurité, la vie ne tient qu'à un fil. Ignorant le temps, les plus jeunes grillent leurs cartouches et traversent n'importe comment devant les automobiles. Les plus âgés aussi, parce qu'ils savent que l'heure approche et que plus rien n'a d'importance. Entre les deux, on apprend à manier l'embrayage pour savourer le jour et la nuit. Pas de rétrogradation, mais une danse subtile au tempo changeant, aux mouvements sûrs, aux pas hésitants. Jusqu'où peut-on aller trop loin ? Le droit à l'erreur exige un minimum de responsabilité, le code en montre les limites. Peu le respectent, mais il y a l'art et la manière. La maturité n'est pas l'apanage des anciens, ni le gâtisme celui de la vieillesse. S'endormir au volant peut être fatal. Oublier l'insécurité des bas côtés, et c'est l'accident. La vie est une course d'obstacles où l'on en saute un pour mieux affronter le suivant. À chaque extrémité de la ligne, des portes s'ouvrent sur des univers insoupçonnés. On ne peut que s'avancer pour les découvrir. La persévérance est le maître mot. Le demi-tour n'existe pas, les droites non plus. Il y a des raccourcis et d'immenses méandres. Dans ce labyrinthe extraordinaire, il faut savoir saisir le fil, chacun le sien, pour ne pas être encorné, ne pas être avalé trop tôt. La fin est biologiquement inéluctable, mais il n'est temps de s'en soucier que lorsque la fatigue vous gagne. Si la jeunesse a parfois peur de la mort, qu'elle ne s'en soucie pas, son temps n'est pas encore venu. Elle ne vient que si on l'appelle. Sauf accident. Car la vie n'est pas juste. Alors surgit le second mot d'ordre, la solidarité, la seule valeur qui résiste à tous les temps et à tous les usages.