À Don Khône, nous avons trouvé le calme et la chaleur du sud, havre de paix dans un cadre idyllique où passer quelques jours avant l'effervescence de Bangkok et le vol du retour. Nous avons élu résidence sur un radeau.


Le bungalow flotte sur un des nombreux bras du Mékong qui serpentent au milieu d'une myriade de petites îles vertes. L'eau de la douche est chauffée par des capteurs solaires, mais le groupe électrogène ne ronronne qu'entre 18h et 23h. Les Laotiens se lèvent tôt, avec le soleil, et prennent très tôt leurs repas. Nous dormons à l'abri de moustiquaires, mais à cette saison les insectes vampires sont rares. Nous ne nous sommes d'ailleurs pas faits vacciner.


Il y a un petit patio pour la sieste et un balcon ouvert sur la rivière. Je regarde le ballet des libellules noires et la nuit j'écoute le chant des gekkos. Il y en a dans toutes les maisons, dans chaque pièce. Ces drôles de petits lézards sortent le soir lorsque tombe la nuit et qu'on allume les lumières, attirant les insectes volants.


Le gérant de la Sala Sae Guesthouse a acheté un gibbon à favoris blancs, espèce pourtant protégée, au marché de Paksé. La cage est trop petite, toutes les cages sont toujours trop petites. On se croirait au Jardin des Plantes. C'est triste.


Il est agréable de marcher pieds nus sur les planchers de teck. Partout, nous laissons nos sandales sur le seuil. Ayant attrapé mal à la gorge entre les mauvaises clims et les tuk-tuks ouverts, nous nous soignons au miel sauvage où nagent encore quelques grains de pollen rouge. Farniente.


Pas tout à fait. Nous avons fait plusieurs belles promenades à vélo au milieu des rizières et dans la forêt jusqu'aux chutes d'eau qui se révèlent ici et là... Pour rejoindre le village de pêcheurs de Ban Hang Khône, au fin fond de l'île de Don Khône, nous avons dû enjamber des ponts cassés en portant nos bicyclettes, marchant prudemment sur les traverses en métal oxydé de l'ancien chemin de fer colonial français et gravissant des pentes verticales terreuses.


Il reste encore une vieille locomotive du temps de la présence française, mais tout le monde a oublié. Le passé n'a pas d'importance, les asiatiques pensent l'avenir.


Comme nous partons tôt, nous ne rencontrons pratiquement personne sur les chemins. Juste quelques animaux apeurés entendus filer sous les feuilles mortes, elles-mêmes tombant des hautes branches comme des hélicoptères. Le long des berges cambodgiennes, nous sommes restés un moment sur un rocher au milieu de l'eau à regarder sauter les derniers dauphins d'eau douce, dits d'Irrawady, du nom du fleuve birman où l'on en trouve également.


Je prends des photos ringardes de coucher de soleil et le matin je me lève à 6h pour écouter la symphonie animale. Le soleil tape fort. Avec ma calvitie naissante je dois porter une casquette. Mon père l'avait au même endroit, mais il prétendait que c'était à force de lire assis dans le lit, la tête appuyée sur le mur ! Papa aurait aimé le Laos. Il aurait certainement plongé dans les eaux glauques comme les pêcheurs décrochant leurs filets et les femmes y lavant leur linge ou faisant leur toilette. Peu d'étrangers s'y risquent. Nous nous reposons enfin avant de remonter à Paksé pour nous envoler vers Bangkok où nous passerons nos deux derniers jours de vacances. Le mois est presque terminé.