Gargouille bis. Tous les soirs avant le dîner, "notre" merle joue ses morceaux préférés. Il les rejoue le matin vers 5 heures, et parfois en fin de matinée. Aux aurores, nous n'y prêtons que rarement attention. La nuit, il se laisse parfois berner par les lampadaires qu'il prend pour le soleil. Chaque merle a son propre chant et celui qui habite dans le coin est un vrai virtuose. Un peu comme celui avec lequel Bernard a enregistré La machine de Marly. Ces "black birds" sont des oiseaux très jazz. Leurs phrasés rappellent Coltrane, Monk ou Parker. À d'autres moments, ils jouent avec leur reflet, dans une vitre, une flaque d'eau, un enjoliveur... Ils ont tout du soliste, tranchant avec le big band de fadas qui s'excite tous les soirs dans la rue Diderot. Cela ne dure pas longtemps, mais c'est assourdissant, pour peu que l'on soit sensible aux aigus. Le reste du temps, les moineaux piaillent en dégustant les fruits de l'églantier qui s'étoffe chaque année un peu plus. Il a construit une tonnelle au-dessus du trottoir. Je suis obligé de le tailler sans cesse pour que les passants ne s'éborgnent pas. La factrice m'a avoué s'y abriter lorsqu'il pleut. Profil obligé, le merle moqueur regarde la scène d'un seul œil.