Les révolutions arabes prouvent que rien n'est jamais joué. Dans l'une de ses conférences, le philosophe Slavoj Žižek s'étonnait que chacun envisage la fin du monde, mais pas celle du capitalisme. La chute des dictatures montre que tout est possible, ou, comme le rappelle mon camarade Pierre Oscar Lévy à la fin de chacun de ses billets, "depuis le 14 janvier 2011, et le début de la Révolution Tunisienne, l'improbable est certain." Je n'irai pas jusqu'à croire, comme mon père me l'enseigna, que le bien finit toujours par triompher, mais la loi des cycles qui régit l'univers, du fait le plus intime aux chamboulements planétaires, de la physique du son et de la lumière à nos humeurs fluctuantes, montre que rien n'est inéluctable. En marge de l'entropie qui ne saurait être négligée si l'on tient sérieusement à notre planète, la révolution est le temps qu'il faut pour nous jouer de bons et de mauvais tours. Rien n'est stable. Aucun système, aucun corps, aucun atome. Le mouvement historique qui vient de commencer peut redonner espoir à tous les aquoibonistes, exploités du monde entier sous la coupe de quelques nantis qui leur font croire que c'est dans l'ordre des choses. De la Chine à l'Afrique, des Amériques à l'Europe, les gouvernements du monde entier sentent le danger d'un réveil des consciences. Car les opprimés de toutes sortes sont des millions de fois plus nombreux que les élites qui les oppriment ou les exploitent. Le démagogique Yes, we can! du président Obama pourrait signifier l'éveil de nos populations anesthésiées, formatées par le corps d'armée de la communication, télévision en tête. Taxé d'utopiste pour n'avoir jamais perdu mes illusions, j'ai coutume de répondre que tant qu'un seul homme résistera au renoncement ambiant le feu de la révolte ne pourra s'éteindre. Sur tout le globe les braises attendent d'être ranimées. Les capitalistes s'inquiètent avec raison, les banquiers fignolent leurs programmes de reconversion, les entreprises de travaux publics se frottent les mains, les marchands d'armes cherchent où créer de nouveaux marchés, et les femmes et les hommes, écœurés de l'arrogance et de l'impunité de ceux qui nous gouvernent, apprennent ou se souviennent que, pour changer le monde, il n'est que soi-même.