L'activité de la ville commence très tôt pour s'arrêter à l'heure des grosses chaleurs, sieste oblige sur nattes ou dans hamacs, et reprend en fin de journée pour mourir à la nuit tombée. Nous nous adaptons au rythme et louons deux vélos, un dollar la journée.
Nous nous perdons dans la campagne autour de Kompong Chhnang, sur des chemins de terre rouge et de sable beige.


Notre sens de l'orientation nous guide heureusement vers des villages de pêcheurs où les femmes trient les poissons emberlificotés dans les filets. Nous retrouvons la rive du fleuve où les échoppes affluent, pressées les unes contre les autres. Nous cherchons le pont sans comprendre que c'est la route rectiligne sur laquelle nous roulons. Les maisons sur chaque côté sont en fait toutes sur pilotis, mais les échafaudages ne se voient que des rizières. Je trouve enfin les chapeaux que portent les femmes et les hommes sur les pirogues et pour se protéger de la poussière. Il y en a plus que nous le souhaiterions. Le soir l'eau de la douche qui arrose nos pieds tourne toujours au marron.


La potière Along, recommandée par un ami archéologue en charge d'un programme à l'UNESCO, vient nous chercher à motos. Nous apprenons que l'État français est le dernier à financer l'archéologie, les autres pays n'ayant que des secteurs privés. Mais pour combien de temps encore, lorsque l'on sait les efforts de notre gouvernement pour saccager tout ce qui faisait la spécificité de notre pays et sa force ?


Nous sommes donc chaleureusement reçus dans une famille de paysans khmers qui met les petits plats dans les grands. Along, si habile potière qu'elle est partie montrer son art au Japon, en Corée, et possède un diplôme du Smith & Sonian Institute, nous fait visiter son village où l'on fabrique encore des pots avec la même technique depuis l'ère néolithique ! C'est incroyable.


Nous passons une exquise journée à la campagne que nous terminons devant le marché avec du poisson grillé et du poulet itou. La nuit est plus agitée, un de ces satanés moustiques ayant échappé à notre vigilance. La symphonie nocturne se joue en plusieurs mouvements : chiens - chats - tarantes - moustique. J'aurai sa peau saignante au lever du jour quand les enfants de l'école en face auront repris le flambeau, articulant en chœur la leçon des maîtres.