Samedi, jour de repos sur le blog, aucun article à publier, ce qui ne m'empêche pas d'en écrire, et mon anniversaire, le sixième sur cette page. La crève qui m'est tombée dessus me terrasse. Après la dépression molle, la mollesse des limbes. Plus de voix. Jamais reçu autant de vœux que sur Facebook, beaucoup d'amis et d'autres que je n'ai jamais rencontrés. Certains préfèrent un coup de fil, un sms ou le mail. Parfois accompagnés d'une vidéo ou d'une image fixe.

Confiné à la maison, la distance évite le passage obligé des cadeaux. Sans fleur ni couronne, ça me va. Je trouve de mauvais goût les collectes de fonds où l'on est sollicités de donner de l'argent pour offrir un cadeau collectif et conséquent. Choisir un présent en dit long sur la relation. Contribuer financièrement est d'une part une façon de s'éviter de chercher une bonne idée et de la réaliser, d'autre part une manière indélicate d'évaluer son rapport. Dans Kashima Paradise de Yann Le Masson et Bénie Deswarte (1973) on voit les Japonais se saigner pour rivaliser dans leurs dons. La convention les ruine. À moins de fixer une somme modique identique pour tous, la tentation de surenchère est vulgaire, pour certains tragique. Je préfère mille fois un truc sans prix bien ciblé, un cousu main avec amour, aux présents dispendieux et impersonnels. Bonne raison pour préférer les 364 non-anniversaires, comme le Chapelier Toqué et le Lièvre de Mars. Faire la surprise d'un cadeau à un moment inattendu. Cela prend parfois du temps. Difficile d'être toujours ponctuel, à moins de s'y prendre des semaines à l'avance ou stocker les possibles au fur et à mesure des balades. Petit investissement malgré tout problématique pour les plus démunis. La présence des amis devrait suffire. Certains n'apprécieront pas la critique. Cela ne m'empêche pas de les aimer.

Quelle panique s'empare d'eux lorsqu'il lance les invitations pour leur anniversaire alors qu'il est passé depuis plusieurs mois ? Courant de nos jours. Le désir d'être doté l'emporte-t-il sur la réalité des faits ? À des lieux des vrais anniversaires où l'on vous demande de surtout n'apporter aucun cadeau. À boire ou à manger peut-être, pour soulager le fardeau du cuisinier ou de la cuisinière. Les commerçants trouveront mon article déplacé. Du pays de la consommation à outrance ils ont importé Noël, la Saint-Valentin et, récemment, Halloween. J'envoie promener une bande de garnements réclamant "des femmes" en l'absence de bonbons. Les rites se perdent ainsi, comme les bonnes manières. Non de les ignorer, mais de les dépouiller de leur logique. Noël approche déjà, un pensum pour beaucoup en ces temps de crise. J'avais suggéré à ma famille de se passer de cadeaux. Les "enfants" se sont rebellés. Je suis revenu à la charge en suggérant qu'ils soient symboliques. On continue à vous demander ce que vous voulez, quitte à faire un échange de chèques. C'est le prix qui s'annonce, pas la tendresse qui s'exprime. La valeur marchande supplante le sentiment. Dans d'autres familles chacun fait un cadeau à l'un d'entre eux selon un système tournant, comme une tontine de Noël. Ou l'on fixe une somme plafond pour ne pas gêner les chômeurs. Seule compte l'intention délicate.

Merci à toutes celles et tous ceux qui m'ont envoyé un message de sympathie et permis de passer cette épreuve avec succès ;-)