Tandis que Télérama axe son dernier numéro autour du Grand Paris j'admire la remasterisation impeccable du film d'André Sauvage, Études sur Paris, tourné dans les années 20. Dans ce DVD édité par Carlotta on aurait souhaité des chapitres plus découpés pour pouvoir sauter de quartier en quartier, histoire de comparer avec aujourd'hui. Le menu ne propose que Paris-Port, Nord-Sud, Îles de Paris, Petite ceinture, De la Tour Saint-Jacques à la Montagne Saine-Geneviève alors que nous sillonnons les rues vides d'automobiles ou du moins très rares, de Montmartre à la Zone, du Châtelet au Bois de Boulogne. Je reconnais ainsi la piscine des Tourelles avant sa modernisation, le Pré Saint-Gervais et l'emplacement des anciennes fortifications... Les chevaux sont partout et personne ne se soucie de la présence de la caméra. Malgré les sensationnelles vues aériennes prises depuis les toits de la capitale, nous sommes plus en présence d'un documentaire, certes passionnant, qu'en face d'un équivalent de Vertov ou Ruttmann. Si le choix de l'accompagnement musical permet d'osciller entre la techno molle de Jeff Mills et le nostalgique et suranné Quatuor Prima Vista, les deux interprétations ne figurent que papier peint, accentuant l'effet cartes postales des monuments cinématographiés. Les suppléments muets du DVD entérinent l'aspect documentaire des travaux de Sauvage, loin d'une recréation visionnaire à la Vigo. Il n'empêche que tout amoureux de Paris y trouvera son bonheur tant le grand écart est fondamentalement poétique.
Quant à Télérama, c'est un beau chantier, laissant le rappeur Oxmo Puccino évoquer la place Stalingrad, l'éditeur Éric Hazan l'incessante guerre sociale chassant du centre les classes populaires, les usagers du RER la ligne B, le créateur de mode Guillaume Henry les Parisiennes, l'écrivain Patrick Modiano sa carte du Tendre, Nicolas Delesalle la diaspora chinoise d'Aubervilliers, Mathilde Blottière mon quartier avec le statut des petites salles d'art et essai face au complexe qui s'ouvre Porte des Lilas. J'ai envie de tout lire, d'autant que ne regardant pratiquement pas la télévision je ne feuillette plus que les premières pages...