J'ai jeté un pont vers l'île aux trésors avant qu'elle ne soit engloutie par un tsunami magnétique. Tous mes magnétophones à bande étant en réparation je continue à numériser, mais cette fois mes VHS. Comme il y en a des centaines je choisis les petits sujets qu'en bon obsessionnel j'enregistrais à la fin des bandes de quatre heures. Il restait toujours un peu de place après les deux longs métrages. Si ceux-ci ont pour la plupart été réédités en DVD il n'en sera probablement jamais de même avec les clips musicaux, les publicités des années 80, les concerts inédits, les magazines, les extraits de journaux télévisés, les opéras, etc. Cette boulimie télévisuelle remonte à la naissance de ma fille. Nous sortions moins et il fallait qu'Elsa soit impérativement couchée à 21h avant que le film ne commence ! Après le 11 septembre 2001 j'ai totalement arrêté de regarder la télé sauf pour les films, et depuis le DVD et Internet j'ai rendu mon décodeur pour ne plus jamais me brancher sur une chaîne.
En fait j'ai sorti le lecteur VHS pour numériser une douzaine de courts et moyens métrages de Françoise que je n'ai jamais vus et surtout son feuilleton-documentaire en huit épisodes, Croisière sur le Nil, qui était passé sur France 3 à 20h.


Comme j'avais terminé de sauver ses précieuses archives je me suis plongé dans les miennes, ou plus exactement l'incroyable téléthèque où chaque cassette est répertoriée dans six classeurs numérotés où je collais les articles de Télérama. J'ai ainsi retrouvé la Nuit du film d'art sur Canal Plus, celle intitulée Doc Doc Doc, des centaines de documentaires, de films d'animation, un condensé de la série Movie Mahal produite par Channel Four qui me permet de retrouver les films complets d'où sont extraits les numéros chantés et dansés, une soirée sur la voix, des documents historiques inestimables... La mémoire meurtrie, le terrible film de Sidney Bernstein sur les camps de concentration pour lequel Alfred Hitchcock supervisa le montage, fait passer Nuit et Brouillard pour une bluette. J'exagère à peine. Les Anglais ont interdit le film jusqu'en 1985 de peur que l'Allemagne ne s'en remette jamais. J'en profite aussi pour copier mes passages à la télé, comme après mon retour du siège de Sarajevo, des plans de manif au Journal de 20 heures, des interviews sur la musique... Il y a heureusement beaucoup de petits sujets amusants, des sketches comme ceux de Pierre Dac, Jacques Dufilho, Jean Yanne... Je sélectionne seulement ceux que j'ai envie de revoir, sacrifiant probablement la majorité de ce fonds. Je n'ai pas que cela à faire, mais je me rends compte de la boulimie incroyable qui m'a toujours animé, un encyclopédisme qui m'alimente autant qu'une soif inextinguible de créer sans cesse.