Dans le bonus du DVD de Ugly, le réalisateur Anurag Kashyap raconte que le film de genre, ici un thriller autour de l'enlèvement d'une fillette, le libère de devoir donner des réponses démonstratives sur la société indienne. Les questions que la fiction génère excitent la réflexion des spectateurs qui sortent de la projection dans le silence. Car Ugly est un film qui dérange comme tous ses précédents films, de Paanch à Gangs of Wasseypur, en passant par No Smoking, Gulaal et That Girl in Yellow Boots. Même Dev.D, remake du blockbuster Devdas, ne peut se réclamer de Bollywood, sa mise en scène critique de la société patriarcale indienne où le policier règne sur les citoyens comme le père sur la famille renvoyant le divertissement coloré à ses chimères vaudevillesques. L'abus d'autorité mène partout à la corruption et pulvérise la morale. L'obsession des Indiens pour le cinéma pousse Kashyap à équiper ses personnages des atours de ces fantasmes. Dans son pays les stars deviennent ministres, la puissance des images se muant en pouvoir politique. Ugly révèle les pires travers de chacun dans un portrait sans concession de la société indienne où les conflits de langues et de religions renforcent la hiérarchie sociale, engluée dans des coutumes sclérosantes et terriblement cruelles.


Anurag Kashyap s'appuie généralement sur des faits réels qu'il transforme et déforme en s'appuyant sur les ressources que le cinématographe lui offre, des rebondissements du scénario à une utilisation de la musique parfaitement intégrée à l'action. Trois faits divers l'ont ici inspiré, aidé par le chef des polices spéciales de Bombay pour que son inspiration ne s'encombre pas d'une fidélité démonstrative qui alourdit tant de films politiques.

Ugly, DVD Blaq out