Avec 4000 articles en 12 ans, mon blog quotidien constitue une partie de ma mémoire. Je l'avais commencé en parlant de moi pour progressivement m'éloigner de mes marottes, ou plus exactement pour les glisser plus discrètement par ci par là dans mes chroniques. Les journalistes ne font que des portraits en creux d'eux-mêmes quelque soit le sujet qu'ils traitent. Autant jouer le jeu plutôt que faire semblant de l'ignorer ! Ce journal extime tient donc à la fois de l'autobiographie et d'une sorte d'encyclopédie généraliste, curieuse de sujets peu ou pas traités ailleurs.
Or ce week-end je me suis aperçu que tous les films provenant de DailyMotion n'apparaissaient plus sur mon blog. L'hébergeur de vidéos a changé les lignes de code qui permettent de les afficher et les anciens liens ne fonctionnent plus. J'ai donc dû remplacer les codes un par un pour que l'espace blanc retrouve son locataire. Ce copié-collé fastidieux n'est pas le premier pour que mon travail reste accessible. Heureusement la version en miroir sur Mediapart ne semble pas avoir été affectée. Par contre, contrairement à drame.org/blog je ne peux y insérer que les trois principaux sites, YouTube, DailyMotion et Vimeo.


Certains de mes films n'existent que sur DailyMotion, alors que la majorité sont sur ma chaîne YouTube. D'autres sont exclusivement sur Vimeo. Il n'y a pas de règle, si ce n'est la lubie du moment. Ainsi le documentaire Idir & Johnny Clegg a capella réalisé en 1993 était devenu inaccessible via ma page, ou encore cet essai expérimental tourné en 1975 avec une vidéo-paluche Aäton, work in progress constitué de notes vidéographiques tournées sans montage, mais qui a l'intérêt d'avoir été réalisé à l'époque des premiers magnétos vidéo "portables", Remember My Forgotten Man.


Il n'y a pas que l'informatique pour faire disparaître systématiquement des pans entiers de notre mémoire et de notre culture. Les œuvres interactives sur CD-Rom ou en ligne ont pratiquement toutes disparues à moins de les faire tourner sur de vieilles machines laborieusement entretenues. L'analogique aussi a ses ruines. Mes archives audio ont été enregistrées sur des bandes lisses 6,35 2 ou 4 pistes à des vitesses différentes, sur des multipistes, des cassettes, des dictaphones, des mini-discs, des DAT et je n'ai pas pu conserver toutes les machines en état pour les lire ; les originaux de mes films sont sur 16mm, 35mm, bande 6,35, U-Matic, Beta, vidéo 8, Hi-8, etc. ; les fichiers ont connu les disquettes, des cartouches de différents formats, sans compter les CD-R, DVD-R, disques durs qui ne montent plus ; les systèmes récents ne lisent plus les fichiers trop anciens et les applications n'ont pas toujours été actualisées, etc. Il faut sans cesse recopier, numériser, pour ne pas perdre le fruit de notre travail, mais c'est en vain. Notre époque marquera probablement un grand trou de mémoire dans l'histoire de l'humanité, s'il reste encore quelqu'un pour s'y intéresser...


Pour terminer, voici le petit bijou qui a donné son titre à mon essai de 1975. Cette chanson est extraite de Gold Diggers of 1933 de Mervyn LeRoy, chorégraphié par Busby Berkeley, paroles de Al Dubin et musique de Harry Warren. Joan Blondell et Etta Moten évoquent la misère de la Dépression avec les vétérans revenus de la guerre. Si cela pouvait nous empêcher de refaire les mêmes bêtises en refusant la politique de nos dirigeants déments, cyniques manipulateurs...