J'ai toujours regretté d'avoir la flemme d'apprendre le langage des signes qu'utilise les sourds. D'un côté je pensais y trouver une sorte d'espéranto me permettant de converser dans le monde entier (comme la musique pour les entendants !), de l'autre je n'ai presque jamais été confronté à mon handicap. Or Signer, le documentaire de Nurith Aviv, m'apprend qu'il existe autant de langages des signes qu'il existe de langues. Chaque culture a sa manière de signer. Le bonus développe la séquence d'introduction avec Emmanuelle Laborit qui montre les différences d'une quinzaine de langues des signes du monde entier sur des mots attractifs comme "faire l'amour", "homosexuel" ou plus simplement "bleu". Le reste du film compare trois langues pratiquées en Israël, l'ISL, langue officielle rattachée à l'hébreu, et deux autres nées à la campagne. J'ai mis un peu de temps à comprendre qu'elles pouvaient être d'origine palestinienne et que leur interdiction avait été forcément politique. Il est passionnant de comprendre comment naît une langue, comment elle acquiert grammaire et syntaxe au fur et à mesure qu'elle est transmise de génération en génération. On apprend que signer ne se fait pas seulement avec les mains, mais aussi en s'aidant des yeux et du corps. Le film d'une heure fut largement salué par la critique à sa sortie en salles. Je n'ai pas compris pourquoi presser 2 DVD pour livrer des sous-titres français, anglais et hébreu au film annoncé en français (alors que c'est seulement le commentaire de la réalisatrice). Ces sous-titres sont intelligemment répartis sur la surface de l'écran en fonction des intervenants parmi lesquels des entendants. Nurit Aviv continue ainsi sa recherche "sur la langue maternelle, la traduction et la transmission."



→ Nurith Aviv, Signer, DVD ed. Montparnasse, 20€