Comme Jean Rochard était passé au Studio GRRR enregistrer Les oiseaux doubles accompagné par Nicholas Christenson, je lui ai demandé de prendre la photo de notre trio avec Jean-Brice Godet, cinquième et dernier épisode de mon laboratoire d'improvisation pour 2019. Jean, qui vit à cheval entre St Paul et Paris, m'avait présenté le jeune contrebassiste de Minneapolis. Nicholas a vingt ans et une imagination musicale égale à sa dextérité. Jean-Brice pourrait être son père et moi son grand-père, mais lorsqu'il s'agit de jouer ensemble je doute qu'aucun de nous soit majeur.
La veille, soit mardi soir, j'avais été renversé par l'exposition de Roger Ballen à la Halle Saint-Pierre et remporté avec moi deux livres sur le travail de l'artiste pluridisciplinaire. J'ai donc proposé à Nicholas et Jean-Brice de choisir des reproductions qui les inspirent dans Le Monde selon Roger Ballen et Asylum of The Birds afin de les transformer en pièces musicales.
You Can't Come Back, Twirling Wires, Homage, Shadows and Stranger ont séduit Nicholas. Jean-Brice a sélectionné Alter Ego (ci-dessous), Shepherd, Posing, Cornered. J'ai préféré The Back of The Mind, Masked Man, Rats on Kitchen Table, Chicken Wings. Il fallait bien choisir, alors que nous adorons l'ensemble du travail de Ballen, mêlant photographie, peinture, sculpture, installation. Les mêmes images se retrouvaient parfois dans nos listes individuelles.


Douze pièces ont ainsi vu le jour, les œuvres de Roger Ballen devenant les titres de nos improvisations fortement inspirées. Il me reste à mixer l'album enregistré hier avant de le mettre en ligne sur Drame.org, qui se retrouvera comme d'habitude en écoute et téléchargement gratuits. Il s'intitulera Duck Soup, évidemment en référence aux Marx Brothers, bien qu'à regarder la photo de nous trois on pense plutôt aux Dalton ! Coincé par une grève inconrtounable qu'on espère convaincante, Nicholas était venu à pied depuis Montreuil avec une contrebasse gentiment prêtée par Benjamin Duboc, et il m'empruntera aussi un bébé violoncelle que Bernard Vitet avait équipé de sillets. Jean-Brice, en plus de sa clarinette et de sa clarinette basse, avait apporté une batterie de cassettophones qui font désormais partie de son instrumentation récurrente. Quant à moi, en plus des claviers, je flûtai, trompettai à anche, guimbardai, archetai, percutai et utilisai mes sempiternels H3000, Tenori-on, Lyra-8, radiophonie, etc. Sans n'avoir encore rien réécouté, il me semble que ce fut une journée prolifique. Le mariage des timbres était particulièrement florissant. Le choix de Ballen s'avéra une excellente idée. Il régnait dans le studio une atmosphère aussi détendue que concentrée, en tous points épatante.
En attendant la publication du nouvel album, j'écrirai très prochainement un article évoquant l'exposition de Ballen qui mérite absolument d'être visitée... J'ai également commandé le DVD Memento Mori / Selfportrait de Saskia Vredeveld qui lui est consacré et est projeté au milieu de sa gigantesque installation.