Tandis que je viens de revoir Cloud Atlas, sorti en 2012, des Wachowski, frères devenus sœurs entre temps, je retrouve un article du 24 janvier 2009 d'un autre de leurs films qui n'a pas non plus rencontré le succès de leur Matrix. Réalisé à six mains avec Tom Tykwer tant ce film de science-fiction adapté d'un roman de David Mitchell est ambitieux, Cloud Atlas ne ressemble qu'à lui-même. Par un jeu de références croisées, il imbrique six histoires se passant en 1849, 1936, 1973, 2012, 2144, 2321. Pas toujours facile à suivre, il fait faire le grand huit à notre ciboulot, telle une comète lorgnant l'infini, convoquant les acteurs dans des rôles différents selon les époques, quitte à perdre le fil pour reconnaître Tom Hanks, Halle Berry, Jim Broadbent, Hugo Weaving, Jim Sturges, Susan Sarandon, Hugh Grant sous leur époustouflants maquillages. Je dois avouer que c'est mon préféré des Wachowski derrière la série Sense 8, objet encore plus "difficile à ramasser". Ce matin en revoyant la bande-annonce de Cloud Atlas je trouve qu'elle résume bien ce que les Wachowski ont semé en filigranes au long des trois heures de film.



SPEED RACER REMONTE LA COURSE

Bien que rarement en accord avec les critiques cinéma qu'en général je lis plutôt après voir vu les films pour me faire ma propre opinion et éviter que l'on me gâche le plaisir de la découverte en me racontant le scénario, j'ai suivi le conseil d'Olivier Séguret dans Libération en allant regarder Speed Racer, le dernier film des frères Andy et Larry Wachowski, auteurs de la Trilogie Matrix et scénaristes de V for Vendetta. Il émanait de l'article quelque chose de l'ordre du jamais vu, on y faisait référence à la 3D, aussi ai-je pensé que nous étions peut-être en présence d'un de ces nouveaux objets qui changent la face du spectacle cinématographique. C'est le sentiment que me procura Tron à sa projection en salle en 1982, comme si il y avait désormais le cinéma avant et celui après Tron. La technique a souvent bouleversé l'histoire de l'art, comme l'invention du tube en plomb donna naissance à l'impressionnisme dès lors que l'on pouvait aller peindre sur nature en emportant les couleurs dans sa poche.


En 2008, en France comme aux États-Unis, la presse éreinta Speed Racer qu'elle trouvait à juste titre bien pauvre scénaristiquement, divertissement des familles un peu cul cul la praline. Comme si la plupart des blockbusters n'obéissait pas à la débilité ambiante, marketés pour un public d'ados de 16 ans ne s'intéressant qu'aux jeux vidéo et au cinéma d'action pour les garçons, aux bluettes à l'eau de rose pour les filles ! Entre les films qui font réfléchir en interrogeant le supposé réel et le cinéma forain qui le fait oublier, le fossé s'agrandit, le niveau social et culturel dictant qu'on doive appartenir à un clan ou à l'autre. Il y a pourtant un temps pour tout, et que le cinématographe retrouve ses origines d'attraction foraine n'est pas pour me déplaire.
Certains films brisent cette convention et mêlent astucieusement la magie à la réflexion. Sans rejoindre ces chefs d'œuvre de plus en plus rares, Speed Racer décoiffe par son traitement graphique et ses effets 3D. L'utilisation de la couleur et du filé, les volets horizontaux qui remplacent les coupes de montage traditionnelles, les trucages sur fond vert donnent des idées de comment les utiliser autrement que pour un divertissement de pure forme. Inspiré d'un célèbre manga, le film explose dans les scènes de course automobile, avec humour et virtuosité, nous faisant oublier les trop nombreux passages dialogués pleins de bonnes intentions. Film à découvrir sans hésiter pour voir l'écran sous un angle différent.