Chers amis,
ne m'en voulez pas, mais je dois être franc. Je n'arrive plus à digérer les fêtes où l'on nous propose à dîner que des cacahuètes. Si la bière et le vin sont de rigueur, les provisions de bouche qui, dans le meilleur des cas, se réduisent aux tomates cerises, aux carottes-choux fleurs trempés dans la sauce, à un pot de tarama et à un assortiment de biscuits trop salés ne me réussissent pas et ne m'ont jamais réussi. Que dire des fraises tagada et des guimauves enrobées de chocolat ? Notre pays a-t-il perdu ses traditions culinaires, que dis-je culinaires, je devrais écrire gastronomiques tant les ressources de nos terroirs et des immigrations successives offrent un champ d'expérimentation aussi vaste que le livre des inventions possède d'entrées ? Comme il est pitoyable de subir l'effacement de ces coutumes devant l'industrie alimentaire entre les mains des multinationales formateuses !
Partager le plaisir du goût rehausse la qualité des conversations. Nos estomacs sécrètent les sucs renouvelant le sang qui circule dans nos veines et dont nos cerveaux ont besoin pour s'affranchir des platitudes de soirée. Chers amis, dites-moi de venir ayant mangé, mais ne m'infligez plus de régime bretzels !
Enfin, si j'évoquais plus haut certaines coutumes qui ont fait la renommée de notre pays je mettrais un bémol au Champagne. Entendre que tout le monde n'aime pas les bulles et qu'il est inutile de se ruiner pour faire genre ! Apportons la boisson qui nous plaît au lieu de nous pencher discrètement vers le robinet de la cuisine. Combien d'entre vous aurait préféré un bon thé ? La fête implique-t-elle nécessairement d'ingurgiter des tas de trucs qui nous plombent ? Offrez nous le choix... Amusez nos papilles comme vous avez souhaité le faire en invitant tel ou telle ami/e.
Et puis ne mettez plus de musique de fond qui empêche d'entrer dans la conversation de convives que nous ne connaissons pas encore. Ou bien allez-y carrément et dansez, dansez... Sans oublier d'aménager le coin cuisine qu'affectionnent les tchatcheurs. Ne croyez pas que l'art de recevoir ne s'apprend pas. J'en ai marre de rentrer à la maison aphone, le ventre en capilotade, en m'étant ennuyé de n'avoir pu discuter avec personne que je ne connaisse déjà. Ou bien la prochaine fois je resterai chez moi avec un bon prétexte, celui de faire la fête.