70 Multimedia - avril 2010 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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jeudi 29 avril 2010

Une histoire populaire de l'empire américain


La prolifération de bandes dessinées politiques à contenu historique fait penser aux illustrés de propagande avant l'avènement des actualités cinématographiques et de la télévision. Je tiens ainsi de mon père un exemplaire de 1912 de L'Alsace heureuse de Hansi qui n'est pas piqué des doryphores. Il est de véritables chefs d'œuvre tel Maus d'Art Spiegelman (Prix Pulitzer 1992), des sagas autobiographiques tel Persepolis de Marjane Satrapi, des reportages impliquant directement des journalistes tels Le photographe de Didier Lefèvre (décédé prématurément en 2007) ou Gaza 1956 de Joe Sacco, des enquêtes pamphlétaires tel L'affaire des affaires de Denis Robert, etc. Certains sont des adaptations de livres existants tel Une histoire populaire de l'empire américain de Howard Zinn (disparu le 21 janvier dernier), les autres ayant été pensés à l'origine dans leur format actuel. Les meilleurs réunissent un dessin original qui colle au propos, un scénario digne des meilleurs romans et une mise en page tenant compte des tournes, tandis que les pires joueront le rôle de vulgarisateurs auprès de jeunes lecteurs qui ne sont pas encore passés à la lecture proprement dite. J'en fais momentanément partie.
Le volume 2 du livre de Denis Robert me donna envie de continuer mes recherches sur le Net ou dans d'autres ouvrages, et je finis par comprendre grâce à lui comment fonctionnent le blanchiment de l'argent sale et les pouvoirs limités des États entre les mains des maîtres-chanteurs de la finance. Le résumé illustré de Howard Zinn, réalisé en collaboration avec le dessinateur Mike Konopacki et l'historien Paul Buhle, tient plus du livre d'histoire en bandes dessinées, mais il a le mérite de révéler des pans cachés ou méconnus de l'histoire américaine, depuis le massacre des Indiens à Wounded Knee jusqu'en 1980 lors de la chute du Shah d'Iran. On reconnaît avec effroi que la politique expansionniste américaine n'a pas changé depuis sa fondation, s'appuyant toujours sur le crime, le parjure, l'injustice, la guerre et le colonialisme. Étouffer ces pages d'Histoire, c'est la reproduire éternellement jusqu'à la catastrophe inévitable, puisque tous les empires finissent toujours par s'effondrer dans la honte et la déchéance. Il est passionnant de découvrir les révoltes des esclaves et le mouvement des Noirs contre le racisme et pour les droits civiques, la résistance des ouvriers et des syndicalistes contre le Capital, le combat des femmes contre le patriarcat, les guerres incessantes de Cuba aux Philippines, du Vietnam à la péninsule arabe, les ingérences en Amérique du Sud comme dans tous les pays du monde. Même si l'on est vaguement au fait de tout cela, l'ouvrage nous éclaire sur maint détail à nous en laisser pantois. Aucun doute n'est permis sur les méthodes monstrueuses et illégales des gouvernements américains successifs depuis des décennies. Les complots fomentés par la CIA sont légion et qui en doute peut se poser la question de son utilité sinon ! Leurs archives ont le mérite d'être déclassifiées plus rapidement qu'en France... Savoir enfin que la résistance existe toujours où que s'exercent l'horreur et la répression est facteur d'espoir. À condition de vivre debout.

vendredi 16 avril 2010

Et les sons pour le jouer arrivent aisément


Je fais des pieds et des mains pour arriver à me prendre en photo pendant que je travaille Mascarade seul dans le studio. La date se rapproche, samedi, c'est déjà demain ! L'obscurité est indispensable pour pouvoir régler correctement la lumière et le contraste de la webcam, de même que le volume sonore de la station radio doit être soigneusement ajusté pour ne pas saturer. Lorsque tous les éléments sont correctement paramétrés, il n'y a plus qu'à se lancer et jouir de l'instrument qu'Antoine a programmé.
Mardi nous faisons notre première répétition à deux. Les trente minutes passent très vite. Il faut encore affiner la structure globale de la pièce, mais je note que c'est très agréable à jouer. C'est toujours bon signe. Un peu comme avec Nabaz'mob, utiliser des instruments extra-ordinaires produit une musique inattendue. J'apprécie l'art expérimental lorsqu'il l'est véritablement et qu'il ne constitue pas un genre.
Les designers interactifs ont un avantage sur les musiciens. Ils ont l'habitude de fabriquer des objets qui doivent pouvoir se jouer sans apprentissage. Toutes proportions gardées, quelques instruments classiques offrent ce plaisir tel le piano qui permet parfois à un enfant ou un novice de faire des miracles si la flamme créatrice touche l'heureux élu. On n'en dira pas autant du violon ou de la trompette. Ainsi je sais qu'un instrument, objet interactif par excellence surtout quand on aborde les nouvelles technologies, est au point lorsqu'il est confortable. Son ergonomie dicte les gestes de l'improvisateur qui saura en tirer le meilleur en évitant le pire ! Par exemple, programmer un timbre de synthétiseur me prend en général une journée pour qu'ensuite je puisse le décliner de mille façons et m'en servir pendant des années dans des contextes orchestraux très variés. Antoine a réussi à rendre notre nouvel instrument suffisamment souple pour réagir différemment selon les émissions qui sont rentrées dans la machine et les manipulations qu'on leur fait subir. Le concept de l'œuvre est aussi déterminant. C'est un peu comme la phrase de Boileau : "Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement..." Et les sons pour le jouer arrivent aisément.

P.S.: Mascarade.TV

mardi 13 avril 2010

Avant-première de Mascarade - samedi 20h30


Madame, Monsieur, bonsoir !
Tout est presque prêt pour la performance de Mascarade qui sera présentée samedi soir à l'Espace Mercoeur à l'invitation des soirées IRL (In Real Life) et en avant-première avant la création qui fera l'ouverture du FIMAV (Victoriaville, Québec) fin mai en première partie de Nabaz'mob.
... panique... -14,9%... le cœur et les nerfs solides pour survivre aujourd'hui... effets de contagion sont d'une extraordinaire rapidité...
Après qu'Antoine Schmitt eut affiné les réglages du synthétiseur construit avec SuperCollider, il s'était attelé aux images des deux présentateurs et au bandeau affiché sous leurs bustes projetés sur grand écran où défilent le flux tel un téléprompteur.
... Je vais vous demander de reculer un petit peu, vous serez gentils, pour mieux voir l'écran !
Jean-Jacques Birgé avait réussi à recycler ses Radiophonies réalisées à la fin des années 70 et une version TV enregistrée au moment de la crise économique de 1983, l'ensemble du montage (de type plunderphonics) étant réparti entre les deux ordinateurs et se mêlant au flux radiophonique diffusé en direct par des postes à transistors (mashup).
... des petites musiques fétiches... comme si l'on faisait un pot-au-feu... il y avait dans ses bagages un instrument à cylindre... toujours est-il que vous nous donnez ce langage secret... du fait de ses antécédents, de sa constitution physique, de son équilibre biologique, de sa structure nerveuse aussi... c'est un peu fort... mollissant lentement en cours de nuit... c'est la permanence du pouvoir de l'agonisant... come, follow... ça peut vous paraître une erreur...
Pour faciliter le choix des effets numériques et le mixage des sources, ils se sont adjoints chacun un petit NanoKontrol relié à la prise USB, mais toute la musique et les images sont jouées sans y toucher, grâce aux mouvements exécutés devant les WebCams, comme deux modernes Theremins !
... les ordres sont donnés par des opérateurs... non, mais il a peut-être des informations que nous n'avons pas... plus des sons harmoniques jusqu'alors inusités...
Les répétitions commencent à devenir excitantes dès lors que les instruments sont au point.
... puisque un scientifique comprendra... de quel côté vous vous endormez... de maintenir la rigueur de ce dispositif... et là vraiment j'ai compris que toutes les expériences que j'avais faites jusqu'à maintenant c'était vraiment positif, je me trompais pas, ça venait tout du cerveau et on pouvait contrôler n'importe quoi...
Il n'y a plus qu'à improviser.
... parfois il faut peut-être penser à l'avenir... de phases d'évolution lente et d'accélérations qu'on appelle des crises...
Comment faire autrement puisqu'il est impossible de prévoir l'actualité émise en direct sur les ondes hertziennes ?
... il voulait ces bruits tout bruts au milieu, badaboum, de l'orchestre...
La structure en trois parties est sous-tendue par une forme ABA, Tenues / Radiophonie / Rythme, qui, lors de la création au Québec, annoncera l'entrée délicate des cent lapins de la pièce suivante.
... j'ai vu que tout de même qu'il y avait des signaux codés... et tu sais que tu mens... j'ai mon train qui déraille...
Si le début et la fin vident le plus souvent les informations de leur sens comme dans n'importe quel show télévisé du 20 heures, la partie centrale offre paradoxalement un afflux de sens au cerveau par la collision des très courts extraits produisant une dialectique constitutive tant des informations diffusées que des conditions d'enregistrement initial de chaque extrait. Et PAF !
... bien au delà, enfin pour aller bien au de là... il semble qu'il faudra compter sur... vers l'imitation, vers le sabotage...
Le paysage social que composent les Radiophonies s'oppose au paysage sonore de la matière plastique.
... la force qui rend esclave... journalisme fiction... il faudra toujours des hommes derrière... j'y mets mes joies j'y mets mes peines...
Le dispositif, à la fois très cadré et totalement improvisé, doit pouvoir surprendre autant les deux présentateurs que le public.
... allo allo... des innocents et le responsable ce sera vous... le technicien a disparu, des pompiers passent à côté de moi le visage en sang, après ce grand silence je crois que nous allons quitter les lieux, nous allons nous mettre dans un endroit un peu plus calme, je vois dans le brouillard des flammes qui s'élèvent...

Fantaisie musicale pour deux présentateurs avec Jean-Jacques Birgé et Antoine Schmitt
... 3500 conseillés... un entr'acte publicitaire...
Samedi 17 avril à 20h30, Soirée IRL, Espace Mercoeur
... enfin on a l'impression que personne ne contrôle plus rien...
Centre Mercoeur, 4 rue Mercoeur, 75011 Paris, M° Voltaire/Charonne
paf 5 euros (demi à 2 euros et bières artisanales à 3 euros)
... c'est ça l'information, monsieur, c'est ça que je veux entendre...
Avec aussi : Romatkin + première partie surprise !

P.S.: Mascarade.TV

dimanche 4 avril 2010

Sur un plateau


Comment réunir un tel casting si ce n'est le temps d'une remise de prix, un éclair entre deux taxis et une coupe de Champagne que je ne saurais partager, n'en étant amateur ? Mateur et midinet il m'arrive de l'être lorsque je photographie ensemble Alejandro Jodorowky, Sophie Calle et Laurie Anderson sous le Palais Brongniart, tandis qu'hors-champ Enki Bilal réfléchit à la prochaine affiche pour les Qwartz de l'année prochaine. La programmation musicale avait mal commencé avec le Suédois Åke Parmerud prenant des poses emphatiques de méchant en saluant la salle avec les trois doigts des Tchetniks qui tiraient sur les habitants de Sarajevo pendant le Siège ou les textes potaches des vieux garçons de Musique Post-Bourgeoise. Le violoncelliste Gaspar Claus tira heureusement l'électro vers l'acoustique en jouant sans autre effet que celui de son archet et de sa caisse, et Macro Disc-section (Jérôme Fino et Yann Leguay) grava ses sillons distroy sur des vinyles vierges en les scratchant en direct pour une noise plus sensuelle que ne le seront jamais les machines que nous programmons. Franck Vigroux nous fit oublier le désastreux maître de cérémonie coupable d'autant d'erreurs de prononciation sur les noms propres qu'il y eut de trophées ce soir-là. Je me souviens de celui de Kurt Entschlager pour les New Media Arts puisqu'il nous fit monter sur scène en tant que membres du jury, d'Olivier Sens pour son logiciel Usine et d'Hugues Germain pour son merveilleux CD Esprit de sel, juste une pincée, très fin, une fleur légère dont la salinité tient à l'alchimie entre instruments acoustiques et manipulations de laboratoire (Césaré, dist. Métamkine). La soirée termina en beauté avec un solo de Laurie Anderson au violon électrique et harmonisant sa voix en mâle organe autour du thème de l'accélérateur de particules qui fait flipper les plus pessimistes. Enfin, après mûre réflexion, je ne confierai jamais au cartomancien Jodorowsky, président des Qwartz 2010, le soin de prédire mon avenir, ni à Calle celui de parler de qui que ce soit, si ce n'est d'elle-même. Quoi qu'il en soit, le clou de la soirée restera pour moi Bruno Letort qui me fit deux propositions enchanteresses que j'évoquerai le moment venu. Youpi ! Au-dessus, le "marché" accueillait les stands des labels de musique électronique, les éditeurs de livres, les festivals et l'on fêtait le centenaire de Pierre Schaeffer.

jeudi 1 avril 2010

Migration douloureuse


P.S. : depuis que j'ai rédigé ce billet, nous avons décidé de quitter OVH aussi vite que nous y étions arrivés. Ce n'est pas cher, mais les réponses aux problèmes que nous avons rencontrés sont si stupides et erronées que nous avons décidé d'aller voir ailleurs... À suivre...

Jacques m'a aidé à faire migrer le Blog et le site depuis Online vers OVH dont les conditions sont nettement plus avantageuses (4,90 € pour un nom de domaine, hébergement de 1,99 € pour 25 Go à 19,99 € pour 500 Go, etc.) et la stabilité plus fiable. Cela ne s'est pas fait sans mal, une histoire de saturation du CPU par les scripts et de surcharge des serveurs qui nous a brutalement déconnectés dans la soirée. Nouveaux identifiants, nouveaux mots de passe, nouveaux réglages de mails... L'iPhone a été le plus coriace : il fallait remplacer l'@ par % dans la description et le nom de l'utilisateur, ssl0.ovh.net pour le nom de l'hôte et le SMTP, utiliser SSL sur le port 995. Ruse de sioux trouvée par Jacques sur le Net, la googlisation du problème étant la première démarche à faire lorsque l'on n'y comprend rien. On y lit presque toujours les commentaires d'internautes à qui la mésaventure est déjà arrivée. Les forums et les tchats sont dévolus à cette entraide. Prochaine étape, la refonte du site !
Je n'ai pas beaucoup de temps pour écrire. Mes journées sont dédiées aux répétitions et aux rendez-vous qui s'enchaînent avec Antoine Schmitt pour Mascarade... Dominique Playoust et Pierre-Oscar Lévy pour un énorme projet Samsung dont je ne sais ce que je peux révéler... Nicolas Clauss pour le deuxième module du serious game 2025 ex machina... Wolf Ka et Sylvain Ravasse pour le poème symphonique pour 100 Vélib'... Étienne Auger pour un jingle de FRA avec l'Opéra de Paris... Sonia Cruchon pour le site des Ptits Repères... Françoise qui termine le montage du film Le son de Vinyl sur le duo avec Vincent Segal à La Maison Rouge... Ce n'est pas tout, seulement les affaires courantes... S'annoncent aussi les collaborations avec Jacques Rebotier et Sacha Gattino, Olivier Mével et Marc Chareyron, Étienne Mineur, etc. Pardon à celles et ceux que j'oublie, il est tard, mais on s'amusera bien... Nos lapins, eux, se reposent, attendant leur envol pour Bucarest à la fin du mois !