70 Multimedia - juillet 2013 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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jeudi 4 juillet 2013

Come Back, South Africa


Pas facile d'écrire mon article sur la seconde soirée des Rencontres d'Arles le jour de la mort de mon camarade Bernard Vitet. Il avait accompagné une soirée mémorable de non-remise des prix l'année de la grande grève des intermittents, nous avions joué trois heures et demie avec le violoncelliste Didier Petit et le percussionniste Éric Échampard. En 1995 nous avions fait une tournée en Afrique du Sud pour commémorer le centenaire du cinématographe avec l'accordéoniste Michèle Buirette et Les vampires de Louis Feuillade. Nous ne pouvions le détacher des manchots du Cap qu'il n'eut de cesse d'approcher avec la patience qui le caractérisait. Deux ans plus tôt j'avais filmé Idir-Johnny Clegg a capella au moment de l'assassinat de Chris Hani et commencé à comprendre que mes préjugés sur ce pays étaient systématiquement contrariés par la réalité quotidienne. Je n'avais jusque là comme référence que l'incontournable film de Lionel Rogosin, Come Back Africa, dont je possède toujours une copie 16mm. Fiction tournée clandestinement dans les townships, c'est un témoignage unique sur l'apartheid.


La seconde partie de la Soirée des Rencontres au Théâtre antique me renvoie à ces voyages sur l'hémisphère sud. Elle présentait le regard le plus récent de douze photographes, six Français et six Sud-Africains, sur le paysage social de ce pays où en définitive peu de choses ont changé depuis la fin de l'apartheid. Les noirs sont toujours les pauvres, même si une moyenne bourgeoisie a fait une timide apparition, et le pays est toujours dirigé par l'argent des blancs. Le passionnant témoignage de la photographe Zanale Muholi (photo en haut d'article) montrait que la ségrégation est restée vivace, entre noirs et blancs (couleur du thème de cette année !) comme entre hommes et femmes, alors que dire des genres ? Ses images n'ont rien de pittoresque, les traditions sont ancrées dans le paysage. Pour cette Transition, titre du projet auquel ont participé Pieter Hugo, Santu Mofokeng, Zanele Muholi, Cedric Nunn, Jo Ractliffe, Thabiso Sekgala, et du côté français, Philippe Chancel, Thibaut Cuisset, Raphaël Dallaporta, Patrick Tourneboeuf, Alain Willaume ainsi que le belge Harry Gruyaert, partagés entre le souvenir et l'oubli, nous avons traversé les mines et les guerres, la violence et la beauté, l'amertume et l'espoir. Cette passionnante plongée, sorte de survol à ras de terre sud-africaine projetant la diversité des regards et la dureté d'une société qui paye lourd son passé, était accompagnée par les baguettes du batteur Edward Perraud qui fit des prouesses de brodeur pour renvoyer la balle aux douze orateurs. Encore une fois la musique transforma l'exposé en spectacle en réponse aux projections de l'équipe de Coïncidence composée des réalisateurs Olivier Koechlin, François Girard dit Gila et Valéry Faidherbe. Edward s'appuyait sur le débit des voix, transformait ses sons électroniquement pour faire vibrer le sous-sol, jonglait pour rythmer les vues d'un pays dont la tradition musicale est essentiellement vocale. Cette fantastique épopée était précédée d'une excellente cuvée des lauréats du Prix Leica Oskar Barnack accompagnée entre autres par des enregistrements de Laurent Rochelle choisis par François Tisseyre.

mercredi 3 juillet 2013

Le théâtre d'ombres d'Hiroshi Sugimoto


Arles in Black. C'est bien le jour et la nuit au Théâtre antique lorsque des musiciens accompagnent les projections en direct ou si les montages photographiques ressemblent à des films de banc-titre. La musique vivante transforme la cérémonie en spectacle. Engager des improvisateurs capables de réagir au moindre mouvement des orateurs fait léviter l'amphithéâtre de pierre. Nous créons la surprise, indispensable au spectacle vivant. Tout le monde y gagne, sur tous les tableaux…


Hier soir la complicité entre le photographe Hiroshi Sugimoto et la harpiste Hélène Breschand permit au public de se plonger dans une œuvre originale où l'art conceptuel devenait tangible. La contemporanéité de la musicienne pinçant, frappant, frottant, électrisant son instrument était parfaitement en harmonie avec les halos de bougie, les ombres grises, les à-plat de couleur des polaroïds du maître japonais qui, loin d'être compassé maria l'humour et l'humilité à l'évocation de son parcours artistique. L'adéquation commentée, chacun, chacune à sa manière, sortait l'œuvre de sa vénération pour lui offrir l'évidence de l'immédiateté. La photographie, quel que soit le temps de pause, est un art de l'instantané.

lundi 1 juillet 2013

Halte lumineuse chez les PapiersPeintres


Halte lumineuse chez les PapiersPeintres à Saint-Étienne. Françoise termine son film sur le couple d'affichistes Ella & Pitr dont la sortie du DVD est prévue le 17 décembre. L'éditeur Jarjille vient de publier un nouveau livre pour les enfants sages les invitant "à déborder un peu du cadre afin de ne pas rester là, plantés comme des images". Renverse ta soupe est décliné sous quatre couvertures sérigraphiées différentes.


Ils ont également réalisé les illustrations du programme du Centre dramatique national de Montluçon et de celui de la Comédie de Saint-Étienne. Pour Le Fracas l'an passé ils avaient collé de gigantesques affiches dans les rues de la ville qu'ils avaient ensuite prises en photo ; cette année ce sont de minuscules affiches qui illustreront le programme. Pour La Comédie ils se sont lancés dans des anamorphoses géantes à la manière de Georges Rousse.
Ils n'arrêtent pas. Leur appartement ressemble à une installation où le côté pratique rivalise avec la fantaisie graphique. Si leur quotidien familial avec leurs deux jeunes fils, Piel et Aki, alimente leurs créations, ils s'appuient sur la moindre faille des murs pour imaginer une œuvre appropriée, comme lorsqu'ils collent dans la rue.