Mardi je jouais le d'Artagnan de ces trois mousquetaires, bouclant l'une des dernières séances de mon prochain disque avec Hervé Legeay à la guitare, Vincent Segal à la basse et Cyril Atef à la batterie. Il ne me reste plus qu'à poser ma voix et mixer l'ensemble avec les sons électroniques que j'ai enregistrés en 1965 ! La technique accaparait toute mon attention de manière à restituer l'électricité produite par le power trio en très grande forme. Répondant à ma demande extrêmement ciblée, Vincent avait proposé une pièce de rock progressif en 9/8 tandis que Hervé lorgnait du côté du Grateful Dead. Les deux s'enchaînent à merveille et je cale maintenant mes mots sur la première partie pour laisser la place à l'envolée zeppelinesque de la seconde.


Si la section rythmique va de paire depuis plus d'une quinzaine d'années sous le nom de Bumcello, Hervé n'avait jamais joué avec eux. Vincent avait assisté à un concert du Drame décisif en 1983 aux Musiques de Traverses de Reims et nous jouons régulièrement ensemble depuis déjà huit ans. Ma seule rencontre musicale avec Cyril est un concert mémorable il y a deux ans au Triton avec eux deux qui avait duré près de trois heures ! Quant à Hervé, notre première collaboration remonte à 1992 pour 'Cause I've Got Time Only For Love avec Elsa qui avait six ans. Tenir le rôle de chanteur de rock m'a toujours fait un bien fou, que ce soit lors de mon premier concert au Lycée Claude Bernard ou plus tard pour les albums Kind Lieder et Crasse-Tignasse, mais cela me terrorise depuis qu'enfant on décida que je chantais faux... Parmi tous mes instruments ma voix livre une intimité sans fard. J'en use plusieurs fois et de manière très variée pour ce futur album extrêmement particulier auquel participent une quinzaine de musiciens, musiciennes et chanteuses.


Lorsque nous eûmes terminé, Cyril endossa l'une de mes vestes et Vincent s'empara du masque de Bernard Vitet pour annoncer l'enregistrement du prochain album de Bumcello qui se trouvait ainsi caché sous les traits du Drame !
De mon côté je repensais à l'Experience d'Hendrix, et aux Cream forcément. J'avais tout de même bœufé avec Clapton chez Gomelsky. On a les références qu'on peut. Pendant la séance je racontai à Cyril comment je m'étais retrouvé à jouer avec George Harrison chez Maxim's. Tout est lié. Le positionnement des instruments dans le panoramique me rappelle les Beatles. Vincent aurait préféré la mono. Et puis j'avais entendu le Dead au Fillmore West à San Francisco. Là j'avais la rythmique de M à sa grande époque qui cartonnait dans le studio avec une efficacité redoutable et la Gretsch d'Hervé qui hurlait dans le Fender en repissant dans les micros de la batterie. Je m'en suis plutôt bien sorti, mais j'ai tout fait en aveugle, pas en sourd ! Je cherchais l'ambiance des années 60 pour mon projet impossible, un truc à la Orson Welles comme lorsque nous avions composé les pièces pour piano de Brigitte Vée avec Bernard...