70 Perso - septembre 2007 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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samedi 22 septembre 2007

Histoire de dents


Je suis rentré hier à Paris me faire poser un implant, là, au fond, à la place de la molaire vacante, quel bol ! On m'annonce une heure et demie sur le billard, 3000 euros non remboursés même avec la mutuelle, le coaltar, week-end sympa en perspective...
Dans quatre mois, j'aurai donc une nouvelle dent pour mâcher (plus d'excuse ?) et j'envisage déjà de remplacer l'incisive de devant que le Dr Lessault m'avait fabriquée il y a plus d'un quart de siècle. La gencive s'est rétractée laissant deviner les fondations. J'avais neuf ans, trois "grands" m'avaient bousculé en courant et s'étaient écroulés sur moi dans la cour de récréation. J'ai pleuré, parce que le matin même, ma maman m'avait fait des compliments sur mes jolies dents. Je craignais de l'attrister d'avoir cassé son œuvre. J'ai arboré un sourire à la dent cassée toute mon adolescence. Lors des soirées psychédéliques, éclairée par la lumière noire d'une lampe de Wood, ma fausse dent devenait un trou, noir.
Un de ces jours, je dévoilerai une image plus gore que l'auto-portrait pris avec Photo Booth avant l'opération. Comme une deuxième rangée de dents en haut et en bas, des exostoses qui me permettent certaines grimaces inédites que j'aime exposer aux orthodontistes pour les épater, pas seulement aux orthodontistes ! Il m'arrive aussi de leur demander pourquoi ils ont choisi un métier où tout le monde les craint, surtout les enfants !


L'intervention dure moins longtemps que prévu. Trois visages sont penchés au-dessus de moi de chaque côté d'un monstre plein d'yeux. Décidé à le prendre comme une expérience, je respire profondément. La douleur ne se réveillera que plus tard. Rien de terrible. Je vois le Dr Noel comme un bricoleur du week-end, préparant ses trous avant d'empoigner sa chignole. J'imagine que c'est plutôt de la joaillerie qu'une pose d'étagères, mais dans tous les cas je me vois mal exercer ce travail minutieux. Le bricolage n'est pas mon fort. La moindre réalisation me semble une victoire sur la matière, même si rien n'est droit. En sortant de chez le dentiste, rien ne l'était, ni ma figure ni le trottoir.

dimanche 16 septembre 2007

Un plan de Paris


Françoise se débrouille toujours pour partir au dernier moment, en oubliant ci ou ça et à me stresser alors que je ne suis même pas du voyage. Une névrose en vaut une autre, je suis plutôt du genre à partir une demi-heure en avance. La ponctualité stigmatise bien des comportements. J'avais donc commencé la journée par chercher l'adresse de Xana sur le plan de Brooklyn pour que Françoise arrive à bon port, les taxis jaunes se perdant souvent dès qu'ils sortent de Manhattan (MapQuest est l'équivalent de Mappy). De son côté, elle réussit à faire faire demi-tour au taxi bleu, pensant avoir oublié ses lunettes qui étaient évidemment dans son sac.
L'après-midi, plus calme et ensoleillée, s'est déroulée en sauts de puce dans le XIème et le XXème au guidon de mon Brompton que je réparai avec succès, mais non sans mal. Il est enfin doté de quatre petites roues pour le traîner façon caddie et d'un feu arrière qui fonctionne ! Hormis la marche à pieds, y a-t-il un moyen de locomotion plus agréable que la bicyclette pour découvrir Paris ? Depuis que je roule sur deux roues, j'ai l'impression d'être en vacances lorsque je conduis et de découvrir la ville comme un touriste. Je m'arrête sur les ponts qui enjambent la Seine, je regarde les vitrines, les cariatides qui ornent les façades, les passants... Et je fais des photos comme si c'était des cartes postales. Celle-ci, prise depuis le toit du Musée du quai Branly, montre le contraste de trois époques : ça, c'est Paris ! Nouvel, Eiffel et je ne sais qui. J'ai également profité de ma journée off pour me faire ratiboiser la colline avant de remonter celle de la Porte de Ménilmontant.

samedi 1 septembre 2007

L'abandon


Saloperie de chat, ingrat, pourri, gâté !
Ayant confié Scotch à Antoine et Chloé, nous avons fait cent vingt bornes pour nous faire boycotter. J'ai eu beau hurler son nom sur tous les tons, siffler son air favori, imiter le caquètement de la poule, tous appels incontournables depuis cinq années de bons et loyaux services, je parle évidemment des nôtres, le chat étant le seul animal à avoir su domestiquer l'homme (gîte, couvert, massage, où il veut, quand il veut, comme il veut), rien n'y fit, le monstre est resté sourd à nos cris comme à nos prières. C'est à se demander si c'est la même bestiole, lui qui n'a jamais dépassé l'enclos de la maison de Luchon ou la terrasse de La Ciotat, et qui passe ses journées à encombrer tous les fauteuils, ne consentant à sortir qu'à la nuit tombée, et encore, si ça lui chante. Depuis notre départ, il aurait même passé deux nuits dehors, c'est le bouquet. Et si vous croyez qu'il nous fera profiter de ces aventures, que nib, motus et bouche cousue ! C'est vraiment un dégueulasse. Pas question que je colle sa photo sur ce billet... Juste un appât !
Pour nous consoler, avant de regagner penauds nos pénates dans le flot nauséeux des retours autoroutiers, nous avons fait un détour par la Ferme de Mauperthuis à Sancy-les-Meaux. Ce genre d'endroit où s'ébattent vaches, cochons, poulets, pintades, lapins et clébards vous donnerait des envies de meurtre gastronomique. Du vrai lait à cinquante bornes de Paris ! Nous craquons pour le fromage, la crème fraîche et le beurre, les pommes et leur jus, le poulet et ses œufs (là, y a un os !), le lapin et la bière de Brie, que sais-je ! Ça nous ferait presque oublier que France Téléconne nous prive de connexion phonique depuis ce matin et que c'est un miracle si Internet consent à fonctionner pour que je puisse épancher ma tristesse à n'avoir pas ramené l'âme de ces lieux.
Coup de théâtre téléphoné (sur portable puisque les autres sont toujours en panne) : le gros minet daigne apparaître en milieu de soirée, et cent vingt bornes de mieux... Là, c'est la fête, ronronnements câlins, effet bouillotte pour la nuit, youpi !