Sa progression sur les planches de la terrasse attire mon regard. Elle rapproche ses pattes arrière de ses pattes avant en dessinant un arc en Ω pour relancer ensuite sa tête vers où elle se dirige et ainsi de suite. Comme je m'approche pour filmer ce mouvement remarquable elle se fige. Je m'éloigne, elle repart. Je reviens, elle s'arrête. Je n'arriverai donc qu'à prendre une photo, réduit à effacer toutes mes tentatives cinématographiques. J'ignore son nom et ce qu'elle deviendra plus tard, mais je compte surveiller tout ce qui vole dans le jardin en espérant que j'arriverai à l'identifier après sa mue.
Je sortais du cinéma L'Olympic Entrepôt lorsque je croise Mercedes avec qui j'avais partagé une liaison de quelques semaines lorsque nous avions une vingtaine d'années. Je l'appelle par son prénom. Comme je sens son regard de myope qui se perd dans le mien, j'insiste, amusé : "tu ne me reconnais pas ?" Non, elle ne voit pas. Six ou sept ans s'étaient écoulés. J'avais coupé mes cheveux longs et rasé ma barbe. Nous avons entamé une nouvelle liaison et nous nous sommes quittés après le même délai de trois semaines pour les mêmes raisons que la première fois. Je ne l'ai plus jamais revue, du moins je le crois.