70 Perso - mars 2015 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mardi 31 mars 2015

Du pipeau


©@ y est. Je c®@que. Je ©ède @ l@ mode féline su® www. Le ©ompteu® v@ ®este® bloqué dans le ®ouge. Soni@ me "®@t ©onte" que le jeu de ©@®tes Exploding Kittens est le p®ojet Ki©kst@®te® qui @ b@ttu tous les ®e©ords : plus de 219 000 ©ont®ibuteu®s, il espé®@it 10 000 doll@®s et en @ obtenu plus de 8,7 millions. Pou® un jeu de ©@®tes !
Nous nous ©ontentons de quelques ©@lins @vec les ©h@ts des ©op@ins pour @tténue® l@ pe®te de S©otch. ©e week-end nous g@®dions Pipe@u. J'igno®e ©omment s'é©®it son nom de ©h@t, m@is ©'est ©omme ©el@ qu'on en joue. En tout c@s lui f@is@it le ©h@®meu® de se®pents en s'@pp®o©h@nt de l@ més@nge n@®©issique qui p@sse des heu®es @ d@nse® dev@nt le mi®oi® posé @u fond du j@®din. Lorsqu'il se lè©he les b@bines je ne s@is p@s s'il @ ®éussi son ©oup pend@ble ou s'il ®êve de l'@veni®. D@ns quelque temps nous @dopte®ons deux ©h@tons pou® qu'ils puissent p@®le® ©h@t ent®e eux. Je me déb®ouille p@s m@l, m@is j'@i un @©©ent épouv@nt@ble...

vendredi 20 mars 2015

Le bureau des pleurs


Les travaux à la maison équivalent à un décervelage complet. Pas moyen de réfléchir à quoi que ce soit d'autre. Mon blog est devenu un compte-rendu de chantier où les avancées entament ma santé chaque jour un peu plus. Une douloureuse sciatique a pris le relais d'une cruralgie handicapante. Le kiné dit qu'elle va passer rapidement, mais je ne sens rien, rien d'autre qu'une rage de dents localisée dans la cuisse. Je dormais peu, mais là mes nuits ressemblent à une histoire de zombies. Je fais des rêves abracadabrants qui mêlent quantité de personnages de ma vie à différentes époques sans que cela ressemble à un véritable cauchemar. Simplement le chaos. Je m'accroche aux rangements, espérant rééquilibrer la confusion. La poussière m'a toujours fait cet effet, allergie à la clef. J'en ai profité pour construire de nouvelles étagères pour les disques alors que je m'étais juré de n'en rien faire, ayant décidé qu'un disque ou un livre devait sortir lorsqu'un nouveau faisait son apparition. C'était sans compter les fantômes que le remue-ménage fait apparaître ou disparaître. Il n'empêche qu'il faut absolument que je donne des livres que je pense ne plus jamais relire et des disques qui me barbent. J'ai conservé trop de choses pensant qu'un jour, etc., mais les années s'accumulant il devient évident que je n'aurai plus le temps d'y revenir. Le tri est un exercice impensable, mais je dois m'y résoudre. De toute manière il va être temps pour de nouvelles résolutions, comme après chaque nouvelle œuvre d'importance. Après un mois le nez dans le guidon je me demande ce qui nous attend. Certains potes prétendent que j'ai toujours quelque chose lorsqu'on me demande comment ça va. Ma blague juive préférée : une mère demande à son fils au téléphone comment il va, le fiston répond que ça va bien ; alors la mère : "ah, tu n'es pas tout seul, je te rappelle plus tard..."

jeudi 19 mars 2015

Des vestes


Depuis un mois les travaux nous ont refoulés à la cave ou dans les étages. Cette fois la peinture du sol nous chasse carrément puisqu'elle s'étend de haut en bas dans l'escalier en s'étalant sur toute la surface du rez-de-chaussée. Nous avons tout de même accès au studio en traversant le garage et le jardin, voie bis recommandée en cas d'encombrement. J'ai accroché quelques vestes de scène devant les dossiers qui ont migré vers mon espace de travail et qui risquent d'y rester quand nous aurons repris possession de la maison. De gauche à droite deux créations de Raymond Sarti, la première pour Crasse-Tignasse, la seconde pour une soirée romaine. Suivent un puzzle de matière plastique années 80 acheté dans une friperie de New York et une sorte de bibendum rouge satiné importable sauf en plein air par -15°C. Lorsque j'ouvre les placards les couleurs vives m'éclaboussent, Issey Miyake pour plus de la moitié, pour le reste braderies de jeunes créateurs, vêtements de travail, souvenirs exotiques... Mais ces jours-ci la mode bagnoletaise est au jean blanchi aux genoux, aux codes troués du gilet et aux Crocs poudreuses avec ou sans moumoute.

mercredi 18 mars 2015

Les souris dansent


Scotch est parti. Grande tristesse. Son cancer du nez s'était propagé. Responsabilité : croquettes or not croquettes ? Que de questions laissées en suspens. Le croquemort connait-il vraiment la nature des produits fourgués par les lobbys alimentaires ? On ne sait plus à quel saint se vouer. Veto and not véto ? Donner à manger la même nourriture qu'à leurs serviteurs humains est-il préférable que ce que les vétérinaires conseillent comme repas équilibrés ? Scotch avait treize ans et demi. Sa truffe a poussé comme s'il nous avait menti sur sa santé, continuant sa vie de chat collant, sans rien dire. Pas un mot, à peine un miaulement. C'était le plus gentil des chats, jamais une bêtise, une crème ! Il jouait encore comme un chaton, mais ne pouvait plus respirer. La maison a perdu son âme, mon violon ne sonne plus. La mort des proches nous renvoie à notre éphémérité. On raconte aussi que les chats ont sept vies, mais peut-être est-ce nous qui avons sept chats dans notre vie ?

lundi 16 mars 2015

Bientôt la quille !


Nous entamons notre quatrième semaine. J'ignore si cela tient du pari stupide ou d'un sport de l'extrême, mais nous sommes sur les genoux. Je combats la fatigue en redoublant d'effort. Ne jamais faire un pas les mains vides. Je vis gainé. Effectuer des travaux dans une maison pendant qu'on y habite est une épreuve que j'avais jusqu'ici évitée. Déménager avait été chaque fois préférable ! En l'état il ne devrait plus y avoir de nouvelle poussière, mais l'ancienne refait surface dès que l'on déplace le moindre objet. J'ai rangé la bibliothèque et nous avons rempli les placards de la nouvelle cuisine. Il faut encore changer les brûleurs pour du gaz Butane, faire les joints de l'évier et de la plaque cinq feux, couper quelques planches et poncer le plan de travail. Après quantité de petites retouches, seconde couche et finitions qui n'en finiront probablement pas, il restera à ragréer et peindre le sol avec de la résine conçue pour les parkings. On couchera dehors. Je fais semblant de savoir où nous allons, mais chaque jour réserve ses surprises. Ma To-Do List est en perpétuelle mutation, c'est son propos, mais je suis trop fatigué pour m'en apercevoir. Je m'endors sur le clavier, incapable de faire autre chose que de m'occuper du chantier.
Ce soir nous irons fêter le septième anniversaire de Mediapart, histoire de rompre le rythme infernal et hypnotique qui nous aspire... Samedi, nous sommes allés au Triton voir Ma grande histoire du rock'n'roll de Evelyne Pieiller avec les comédiens Jacques Pieiller, Jean-Marc Hérouin et le groupe Rise People, Rise! composé de Lucas de Geyter qui chante en jouant de la batterie, Frédéric Talbot à la basse, Johan Toulgoat à la guitare. C'est aussi une histoire de famille, un passage de témoin, le refus de rendre les armes. Très beau texte tranchant comme un coupe-papier, démarquage musical électrisant qui sait jouer discrètement des références en mettant la gomme, inextinguible allumage des comédiens refusant de jeter l'ancre, une rage de jouer communicative...
De temps en temps des amis nous invitent à manger pour nous éviter le catering au fond du garage ou le pique-nique sur le divan du salon. Mais à cette heure-ci je rêve d'un brancard qui me porte jusqu'à mon lit.

jeudi 12 mars 2015

Reprise de couleurs


Le ponçage terminé, nous conservons la poussière récente sans en rajouter. La maison reprend des couleurs, mais nous ne sommes pas sortis du trou. Nous en sommes à l'étape peinture et montage de meubles. Autant dire que nous en avons encore pour un bout de temps. Pour la cuisine les conseillers d'Ikéa ne nous ont pas facilité le travail. Le premier, désagréable et omnubilé par la symétrie et les nuances de gris, nous a raconté n'importe quoi. Le lendemain, le second, plus aimable, nous a vendu des éléments indisponibles. Il a fallu courir dans une autre succursale, se faire rembourser de ce qui ne convenait pas, etc. Le troisième, très affable, a complété par ce qui semblait manquer, mais, partis sur de fausses bases, nous nous sommes retrouvés avec des tas de trucs inutiles qu'il faut maintenant rapporter et d'autres qui évidemment manquent pour terminer la cuisine. Nous en sommes à la cinquième visite, ce qui, paraît-il, est un exploit !
L'incompétence est forcément liée aux conditions de travail. Elle gagne progressivement tous les secteurs de notre société. Manque de formation, exploitation salariale, flicage sur la rentabilité, etc. Jeu de cubes pyramidal, la direction impose ses tares à tous les niveaux de l'entreprise. L'enseigne suédoise n'échappe pas à cette règle imbécile, malgré les astuces de ses ingénieurs en matière de conception et de réalisation. Les concurrents ne valent guère mieux, plus chers pour une qualité moindre ou égale, et l'artisanat en la matière est devenu inabordable financièrement.
La bonne nouvelle, c'est que chaque jour nous approchons du but.

mardi 10 mars 2015

Françoise


Voilà plus de treize ans que nous vivons ensemble pour mon plus grand bonheur. Notre rencontre représente ma quatrième naissance après ma venue au monde, mai 68 et le siège de Sarajevo. Je n'avais jamais vécu telle complicité, confiance réciproque qui nous fait grandir à en toucher le plafond. Nos araignées qui y ont pris leurs quartiers chantent et dansent jour et nuit. Nous avons appris à trier nos petits grains de l'ivraie, et cela ne se fait jamais sans mal. Tu es à l'image de tes films, pleine de fantaisie et d'invention. Tu es aussi à l'image du travail qu'ils te donnent pour correspondre à tes désirs, remettant sans cesse l'ouvrage sur le métier, repoussant l'échéance tant que tu n'es pas satisfaite. J'admire ton infatigable engagement politique qui se manifeste au quotidien, compassion pour les personnages de tes documentaires et de tes fictions, soutien des plus fragiles et utopies insatiables pour lesquelles tu te bats comme une diablesse. J'adore ton petit minois rieur et la douceur de ta peau. Joyeux anniversaire, mon amour !

Photo de Françoise Romand par Steve Ujlaki, Los Angeles, 2014

En travaux


Le journal extime est un exercice périlleux et difficile.

lundi 9 mars 2015

Monomaniaque


Je le savais. J'avais annoncé la couleur. Les travaux à la maison m'empêchent de travailler. Il m'est impossible de penser à quoi que ce soit d'autre. Nous vivons depuis quinze jours dans la poussière, repliés dans les étages pour nous reposer (bien que je sois levé dès 6 heures) et dans le garage qui sert de catring où nous n'avons nulle part où nous asseoir. Nous y avons installé le micro-ondes, la bouilloire électrique et le grill-pain. Lorsque nous ne prenons pas des mesures avec le mètre nous courons les magasins pour acheter du carrelage, des luminaires et, le plus douloureux financièrement, les meubles de cuisine. L'addition est évidemment beaucoup plus salée que prévue, mais ce sera beau et probablement plus pratique.
Il a fallu des jours pour trouver une solution qui nous satisfasse tous les deux pour dessiner le plan de la cuisine. Elle sera donc en U, agrandissant l'espace du salon, sur toute la hauteur sur un seul des trois murs. Même chose avec les couleurs qui ne seront pas très différentes des choix d'il y a quinze ans. La cuisine reste dans les tons chauds du jaune à l'orange avec une remontée saignante du rouge, les toilettes seront encore plus vertes qu'avant puisqu'à l'extérieur autant qu'à l'intérieur, mais nous conservons quasiment les mêmes nuances comme pour le sol bleu canard et les marches de l'escalier bleu ciel avec la rampe et les plinthes noires. Le volume nous impose la direction scénaristique. On marche sur l'eau et s'envole vers les nuages, nous chions dans l'herbe et mangeons au soleil ! Même si je devrais conjuguer tous ces verbes au futur, car il nous reste bien encore quinze jours avant de regagner nos pénates.

mercredi 4 mars 2015

"C'est Beyrouth !?"


Les analogies fleurissent sur les gravats de la cuisine. La comparer à Beyrouth est exagéré, d'abord parce que c'est censé durer seulement quelques jours, ensuite c'est ignorer les éclats d'obus qui vérolaient les façades comme un gruyère rassis. De plus, il pleuvait lorsque je suis arrivé dans la capitale libanaise et la boue qui colle aux semelles est très différente de la poussière sèche du ponçage. Depuis quinze ans j'avais réussi à repousser les tranchées et les coups de masse. C'était sans compter l'opiniâtreté de Françoise qui me travaille au corps depuis une décennie pour que nous aménagions différemment la cuisine. Tout a commencé par un passage au blanc du premier étage. J'espérais que ce traitement appliqué au rez-de-chaussée suffirait à calmer ma compagne. Que nenni ! Les toilettes martiennes où vivaient des Lilliputiens vert pomme sont transférées dans les archives pour bénéficier d'une fenêtre donnant sur l'allée des sorcières et le bar a sauté, agrandissant considérablement le séjour. Notre espace de création culinaire prend ses aises tout en accrochant la lumière. Nous ne sommes pas au bout de nos peines. Le plan de bataille du mobilier cuisine reste à établir. En attendant, nous nous sommes repliés vers les étages et le garage où nous avons installé un four micro-ondes. J'envoie ces notes depuis le camp retranché du studio de musique où Scotch a pris ses quartiers.