Cette plaisanterie lui a flanqué le tournis. L'araignée n'a pas besoin de balancier pour avancer sur le fil. Son costume de cosmonaute extraterrestre est amusant, mais moins pratique que le sien. Au contact de l'herbe le tissu se nettoie comme un chat fait sa toilette. Il aurait dû inventer le même genre de soie pour les pieds. Tais-toi. C'est bon de penser à rien. La prise en charge est offerte par la brise qui souffle sur la clairière où Max est allongé. Dans le sous-bois qui l'encercle les habitants continuent leur symphonie de bruits microscopiques. L'abri est flou, offrant une perspective sur un nulle part qui ne saurait durer. Les nuages peignent la seule issue rapide. Il se souvient de Iago et Otello dans le court-métrage sublime de Pasolini, lapidés par la foule des spectateurs en colère. Pour affronter les ronces, la marionnette retend ses fils et se redresse membre après membre, comme on numérote ses abattis. Son squelette craque. Les petites bulles de plastique explosent une à une sous les doigts des nerveux. Les plus jeunes se pincent mutuellement leurs points noirs. Attends, j'en vois encore un ! C'est sans fin. Pas pour lui. La marche procure une sensation de bien-être que le sommeil lui interdit. Les fantômes hantent ses nuits en passant par la trappe pour lui raconter des histoires à dormir debout. À quoi lui aurait servi un cintre sans la tringle ? L'araignée ne bouge plus d'un cil. Sont-ce ses yeux rougis au feu de l'étoile qui scrutent, auscultent ou tâtent la température des corps alléchants ? Ses sens sont sans dessus dessous quand souffle le soufi. Rester couché lui collait mal au cœur, une maladie qui n'existe qu'en français. Il faudra bien traduire pour alerter le monde de ce qui se trame. Quand Max s'accroche à l'arbre, l'aranéide se carapate, vieux réflexe primate qui flaire le danger. La rosée s'évapore. La solitude n'est qu'une solution provisoire. Il faut renouer des liens, s'inventer de nouveaux ports d'attache, se ficeler un itinéraire comme on barde un rôti.