70 Voyage - mars 2014 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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jeudi 20 mars 2014

El Paso Tango


J'ignore ce que c'est. La plante en séchant se sera ouverte. J'ai réussi à ne pas la casser depuis que je l'ai ramassée sur la piste d'El Paso dans le désert texan en 1968. Les déménagements sont en général fatals à ce genre de souvenir. Il m'en reste trois, mais celle-ci est la mieux conservée. Je les ai trimballées dans ma valise pendant des semaines, de San Francisco à la Nouvelle-Orléans, de San Antonio à Hartford, Connecticut. Je ne crois pas en avoir parlé dans mon roman USA 1968 deux enfants. Comment les avais-je protégées ? Je ne sais plus. Sa figure de danseur de tango m'a toujours fasciné. J'ai soufflé sur la poussière avant de prendre la photo. Depuis combien de temps était-elle posée sur le sable quand je l'ai trouvée il y a quarante-cinq ans ? Le vent l'avait-il traînée jusque là ? À quoi ressemblait-elle lorsqu'elle était vivante ? J'aimerais connaître son nom.

P.S.: Extraordinaire découverte de mon ami anglais Gary May, journaliste à ImproJazz, mais qui fut jardinier de la Reine pendant de nombreuses années. Cela ne s'invente pas ! Un personnage directement sorti d'Alice au Pays des Merveilles.


Et Gary met le doigt sur un article évoquant mes griffes du Diable ! Les Devil's claws (Proboscidea louisianica ssp. louisianica) y sont présentées comme un des plus étonnants spécimen de la végétation nord-américaine, utilisé par les Indiens pour faire de la vannerie et aux propriétés médicinales antalgiques. Mais le plus hallucinant est leur rôle d'auto-stoppeur, ou plus exactement d'homo-stopper, la gousse de la plante s'accrochant aux rares aventuriers du désert pour aller semer ses graines. Si j'avais su cela plutôt je l'aurais évidemment inséré dans mon dernier roman, cette cousine du sésame ouverte au voyage devenant le symbole de notre incroyable périple (deux enfants livrés à eux-mêmes font le tour des États-Unis pendant trois mois à l'été 1968).

Autre article en français indiqué également par Gary May.

lundi 3 mars 2014

Chacun cherche son chat


Joli début de semaine à fêter le retour de Gezi disparue pendant six jours et six nuits ! J'avais la garde d'une jeune chatte de six mois pendant la semaine où ses maîtres (ou ses domestiques, selon la conscience que l'on a des félins qui vivent avec nous) étaient en vacances en Turquie. Armagan et Christophe étaient souvent venus à la maison avec Gezi, du nom du parc où se réunissait la résistance stambouliote, histoire qu'elle fasse connaissance avec le vieux Scotch. Une amitié était née entre les deux bestioles. Scotch plaquait de temps en temps au sol l'excitée lorsqu'il en avait marre de jouer au judo, prise facile avec son poids huit fois celui de la demoiselle. Et la câline de ronronner dans mes bras jusqu'à ce qu'un matin, ayant découvert deux jours plus tôt le passage secret qui mène à la rue, elle disparut. Panique à bord ! Je cherchai dans tout le quartier, appelai la vétérinaire, la Maison du Chat, sonnai chez les voisins, arpentai les rues... Sans succès. Ma première nuit fut blanche comme je sursautais au moindre bruit. J'étais malade d'annoncer à mes amis la nouvelle. Ils la prirent plutôt bien, connaissant mon tendre dévouement et comprenant que, vu l'époque de l'année, la jeune chatte avait probablement eu ses premières chaleurs et était partie courir le guilledou. On avait beau nous raconter que tel chat était revenu au bout de dix jours, un mois, trois mois, six mois (sic), nous cherchions Gezi partout comme des fous. Armagan et Christophe collaient des dizaines d'affiches, Françoise rentrée de La Ciotat appelait partout elle aussi l'animal, les voisins s'y mettaient, mais nous faisions chou blanc. Momo trouva même un gros lapin bélier sur le chemin ! Il faut tout de même préciser que Gezi est particulièrement tendre et jolie, et surtout très jeune. J'aurais fermé le soupirail si Armagan m'avait appelé d'Istanbul après qu'on lui ait lu dans le marc de café un problème avec son chat. Heureusement la sixième nuit des petits miaulements aigus me réveillèrent. Gezi, excitée comme une puce, se frottait le long du lit. Scotch lui renifla le derrière pendant que nous réveillions nos amis qui malgré l'heure tardive (ou très matinale) rappliquèrent dare-dare en pyjamas. Tout est bien qui commence bien, mais ces six jours n'avaient pas été des plus joyeux. Comme pour Scat qui disparaissait tous les week-ends on ne saura jamais où Gezi est passée pendant sa fugue. Seul peut-être Scotch en a les clefs, mais il ne cafte pas. Ce qu'on peut être bête parfois !