J'ai enfin vu et entendu mon travail pour Quantum, le nouvel espace de Saint-Gobain dans le Marais. Vu, parce que la musique a été composée en synchronicité avec la scénographie multimédia d'Alain Dupuy, le design de Bénédicte de Lescure, les lumières de Jean-Pascal Pracht et bien évidemment la composition visuelle de Valéry Faidherbe. C'est ainsi que les rôles sont annoncés sur le mur. Entendu, imperceptiblement, car j'ai laissé aux permanents de l'espace le soin de régler le volume de mon "habillage sonore" (tel quel affiché, mais je n'ai pas choisi cette appellation). Renonçant à créer deux mixages différents pour des impératifs techniques, j'ai programmé trois niveaux sonores, le "normal" pour les visites, le "puissant" pour les soirées surpeuplées et un "minimal" pour le quotidien. Comme je demande à la responsable de la galerie si la musique n'est pas trop envahissante, elle me répond qu'elle l'oublie complètement. Cela se comprend, entendu qu'elle laisse en permanence le niveau minimal, transformant la composition structurée en new age de confort ! C'était à s'y attendre. On perd la finesse du synchronisme et les variations de dynamique au profit d'un filet vaporeux qui ne laisse transparaître que les crêtes, mais le pari est gagné. Le risque de la suppression totale est dans le cas de ce type d'installation le plus menaçant. L'enjeu était de rendre l'espace plus agréable que dans le silence de son arrière-cour. La science-fiction est à portée de main. On plane.
Le spectacle, tout en nuances, dure 25 minutes et présente 6 verres technologiques agencés en un paravent de 15 mètres de long. J'ai déjà raconté mes barbotages aquatiques pour rendre la salle de bain chauffée au Thermovit. Je fais passer l'Electrochrome des cigales vers un îlot d'oiseaux si le soleil est trop éblouissant. Au premier souffle de buée la glace tinte lorsque dégivre l'E-Glas. Le film s'anime sur l'écran du Priva-Lite devenu opaque. L'écran de leds colorées m'a inspiré des grappes de notes dynamiques tandis que les motifs lumineux du Planilum déclenche des nappes reposantes. Des ponctuations légères marquent chaque nouvelle séquence de cet ensemble varié en en conservant le calme et la douceur du verre. L'intelligence, l'excitation et la sérénité dans lesquelles les enregistrements avec Sonia Cruchon et Valéry Faidherbe ont été réalisés m'ont permis de composer ce travail de commande "comme ça me chante", avec cette liberté qui est le meilleur gage qu'un artiste puisse espérer pour livrer le meilleur de lui-même. On plane, disais-je.