Pas de doute, nous sommes bien arrivés en Roumanie, la patrie des vampires, mais la photographie dans le miroir semble indiquer que nous n'avons pas encore été totalement contaminés ! Dès que nous avons mis le pied dans l'Airbus de la Tarom, le monde a basculé. Les consignes de sécurité passaient en boucle, déversant leur son en un puissant flot continu. Bien que ce soit l'heure du thé on nous servit un vrai repas avec la viande blanche baignant dans le poivron rouge. Je m'endormis sur le quatrième chapitre de La fin des temps que m'avait justement conseillé Antoine dont c'est un des livres préférés.
Nous comprenons vite que nous sommes en terrain méridional. Les Roumains conduisent comme des Italiens. De jeunes étudiants nous confient regretter l'époque communiste qui ne comptait aucun SDF. Dans le centre de Bucarest, les terrasses des cafés débordent de jeunes gens, mais il est difficile de trouver un restaurant. Nous finissons par tomber par hasard sur Caru' cu bere, une gigantesque brasserie qui sert des spécialités locales. Je choisis de délicieuses feuilles de vigne farcies et fumantes, nappées de crème fraîche légère et accompagnées de polenta et d'un piment vert à vous emporter la gueule.


Deux mâles français à l'étranger matent forcément les filles. Elles sont incroyablement jolies et... très jeunes. Pas de chichi, pas de maquillage outrancier, une simplicité et une atmosphère tendre qui fait plaisir à voir. J'ai beau être du signe du dragon qu'en roumain on traduit "dracul", je ne mords pas. Pourtant ma chemise à fleurs et la pancarte "Artiste" pendant au bout d'une chaîne en métal que les organisateurs du festival m'ont accrochée autour du cou me fait ressembler à un Tzigane sur son 31 ! Ce n'est pas forcément une bonne idée, on sent pointer un fort rejet de cette population parmi les Roumains pourtant sympathiques et ouverts.
Le Festival Rokolectiv revendique la musique électronique, mais la programmation sonne très pop. Cette souplesse est loin de me déplaire. À l'entrée, les sponsors arrosent cette jeunesse, particulièrement les filles, de paquets de Marlboro, rendant l'air vite irrespirable dans la salle de concert. Je rentre sagement à l'hôtel dont ma chambre donne sur l'incroyable ancien palais de Ceauşescu, un monument gigantesque qui fait passer les pâtisseries mussoliniennes pour des cabanons.