Invité à l'inauguration des Histoires de Babar au Musée des Arts Décoratifs, rue de Rivoli, j'ai enchaîné goulument cinq autres expositions avant d'atterrir à la galerie des jouets où les enfants, jeunes ou vieux et même très vieux, s'émerveillent devant les éléphants en costumes.
J'avais commencé par le graphiste Stefan Sagmeister dont Another exhibit about promotion and sales material est présenté jusqu'au 19 février ; connu pour ses pochettes de David Byrne, Lou Reed ou des Stones, et de nombreuses pubs, ce qu'il montre ici est très expérimental, mais ce sont toujours des commandes, parce qu'il n'y a qu'une manière d'aborder les choses.
Passionnant, mais évidemment moins spectaculaire que les Récits de mode de Hussein Chalayan (attention urgence : dernier jour dimanche), mises en scène de vêtements souvent provocants où la société est réfléchie sans concession, quand le tchador croise la haute-couture et qu'elle-même absorbe des objets, des meubles, ou des images du monde arabe. Les questions sont entières. Tout semble possible. Le britannico-turc ne laisse rien au hasard.


Le troisième choc est produit par Goudemalion, rétrospective éclatante de Jean-Paul Goude qui fourmille de malice et d'ingéniosité (jusqu'au 18 mars) ; découpages graphiques qui recomposent les corps, couleurs à la vivacité explosive, dramaturgies surprenantes de pubs tournées comme de très courts métrages, automates que l'on penserait sortis des vitrines de Noël, la gigantesque locomotive du 14 juillet, etc. Il ne manque que le raton-laveur, mais une fée ne parlant que le russe glisse magiquement comme une patineuse avant d'aller s'asseoir devant un miroir où des flammes jaillissent de ses paumes. "Mais c'est pas tout, mais c'est pas tout !" chantait Bourvil. La prochaine cuvée des Arts Décos ne sera peut-être pas aussi corrosive (Van Cleef & Arpels, Louis Vuitton Marc Jacobs, Ricard 80 ans de création, Graphisme et French Touch, Bijoux contemporains en céramique...), c'est le moins qu'on puisse dire.
Dans les galeries contemporaines, Maarten Baas, les curiosités d’un designer (jusqu'au 12 février 2012) propose un mobilier sombre, tordu, brûlé, surréaliste, là aussi dans une dramaturgie qui fait basculer l'exposition vers l'installation. C'est ainsi que je me rends compte que j'avais malencontreusement zappé tout le mobilier moderne la fois où j'avais visité cet extraordinaire théâtre qu'est le Musée des Arts Décoratifs. Des lucarnes du neuvième étage de cette aile du Louvre les vues sur Paris sont merveilleuses quand tombe le soir.
Collection permanente exceptionnelle ou expositions éphémères tout aussi fabuleuses, vous avez le choix, que vous connaissiez déjà l'endroit ou pas. Et la programmation actuelle mérite que l'on s'y précipite.