La Semaine du Bizarre organisée au Studio Berthelot à Montreuil s'est achevée cette année par une série de concerts épatants, terme qui sied à ces spectacles inattendus qui sortent de l'ordinaire. Tandis qu'Arnaud Rivière triture les boutons de ses machines bruitistes ou fait grincer des plaques de métal Thierry Madiot insuffle un courant d'air à des trompes les plus diverses, du trombone basse à d'immenses tuyaux télescopiques. L'air comprimé s'engouffre dans des ballons de baudruche qu'il pince ou vient frapper ses lèvres, sculpté comme si c'était une guimbarde. Je ne suis pas un grand amateur de noise, mais l'expérience est intéressante, même s'il manque à mon goût une forme globale qui échappe à cette accumulation d'instants expérimentaux.


La performance de Vania Vaneau fait d'abord souffrir tant elle pousse son corps au delà du raisonnable. Inspirée des transes chamaniques brésiliennes la danseuse construit une suite de rituels où elle joue sa peau quitte à la recouvrir d'une épaisse couche d'oripeaux dont elle renaît comme d'un cocon après l'avoir transformé en linceul. La nudité qui suivra se devine hélas alors, parcours formaté qui affaiblit la plupart des prestations qui y ont recours. Les poudres aux couleurs éclatantes lui permettent néanmoins de nouvelles mutations démoniaques pendant que Simon Dijoud continue à jouer imperturbablement de sa guitare électrique avec un calme olympien qui contraste habilement avec l'hystérie chorégraphique. Au milieu du spectacle une très belle accumulation sonore, cette fois enregistrée, renvoie à l'afflux de sens qui monte à la tête...


Pour composer sa Mnémotechnie sonore et musicale Vincent Epplay a superposé deux montages d'archives cinématographiques dont il traite le son en temps réel avec des pédales d'effets qu'il joue avec les mains. Les films entretenant tous un rapport au son, ils forment duo avec le musicien qui a structuré sa prestation en plusieurs séquences s'enchaînant sans temps mort. Epplay a choisi des extraits où les instruments de musique à l'écran semblent sortis d'un vieux film de science-fiction, propulsant la performance live hors du temps, comme si l'anticipation était l'affaire du passé ou que l'avenir n'avait jamais existé. L'humour qui s'en dégage est souvent symptomatique de la recherche du bizarre.