Je déprime très rarement, mais parfois un réseau d'émotions me pousse à une tristesse qui m'envahit sans désir de la vaincre. Pour en arriver à cet état il faut que les attaques se portent sur plusieurs fronts, sans que j'en sois forcément la cible. Quantité d'évènements sont susceptibles de m'affecter, de la compassion individuelle jusqu'à l'état du monde. Les défenses immunitaires affaiblies, le risque est de tomber malade.
Moment mal choisi, car je dois subir une grosse opération dentaire en fin d'après-midi. Cette intervention qui s'étalera sur plusieurs mois n'est peut-être pas étrangère au blues qui m'envahit. La perte d'une incisive est certainement symbolique. Comment mordre sans ? Grrr ! Lorsque j'étais en neuvième, l'équivalent du CE2, trois garçons plus âgés m'avaient renversé accidentellement dans la cour de récréation. La dent cassée que le Docteur Lessault avait remplacée lorsque j'atteins 22 ans avait tenu une trentaine d'années, mais le dentiste suivant avait mal rebouché le conduit et une infection récurrente m'oblige à ajouter un nouvel implant au centre de ma mâchoire supérieure. L'opération est compliquée. La perspective de la greffe osseuse ne m'enchante guère, mais je n'ai pas le choix et je vais devoir porter un appareil en attendant la cicatrisation. J'ai la chance de posséder de magnifiques exostoses où la chirurgienne va pouvoir puiser la matière première.
Cela n'explique pas tout. Demain j'aurai probablement déjà évacué ma peine. Pessimiste gai, je brûle d'un soleil intérieur qu'il faut tout de même ranimer de temps en temps. J'ai ajouté cette phrase pour n'inquiéter personne, surtout après avoir choisi ce Saint Jérôme du Caravagge photographié Galerie Borghese pour illustrer mon article, icône d'ailleurs très positive...