Monique me suggère d'écouter le nouvel album du guitariste Pierre Durand, ¡Libertad!, enregistré avec le ténor Hugues Mayot, le contrebassiste Guido Zorn et le batteur Joe Quitzke. Je suis toujours un peu gêné de demander que l'on m'envoie un disque sans savoir s'il me plaira, ou plutôt s'il m'inspirera quelques lignes. Comme pour tout ce que je produis, musique ou textes, design sonore ou spectacles, je suis happé par ce qui coule de source. J'ignore l'angoisse de la page blanche. Est-ce la facilité ou la paresse, la passion ou la boulimie du workaholic ? Il y a toujours une idée, un objet, un arbre ou un animal qui me sourit.
Ce matin, bonne pioche ! Le second chapitre des sept envisagés (le premier était un solo il y a quatre ans) est un voyage dans le jazz, en commençant par ses racines africaines, sa déclinaison bluesy pour suivre ses influences européennes et ses conséquences rocky. Durand compose de tendres mélodies pour ses interprètes, fait danser ses auditeurs et se projette dans un futur dystopique qu'en bon résistant il combat créativement. D'un continent à l'autre il envoie de toutes les couleurs, de l'esclave noir aux rouges de peau parqués dans des réserves, des caraïbes tropicales à la côte pacifique, bravant les embruns et les coups de soleil. Si j'adore les frappadingues en costume d'arlequin, j'apprécie toujours la virtuosité qui se fait discrète, comble de l'élégance.

→ Pierre Durand, ¡Libertad!, CD Les disques de Lily, dist. Socadisc, 12€+poste