Pascale m'a offert l'enregistrement de l'auto-portrait de Brigitte Fontaine dont j'ignorais l'existence. À la fin des années 60 j'avais trois muses dont le chant orienta probablement ma manière de concevoir les textes en musique. J'eus plus tard la chance de collaborer avec Colette Magny (Comedia dell'amore 315) et Brigitte Fontaine (Amore 529), me contentant d'écrire sur Catherine Ribeiro...
Ainsi toute nouvelle contribution de Brigitte, qu'elle soit musicale ou littéraire, m'enthousiasme. Comme celle de Marianne Faithfull, sa voix a changé au cours des siècles. La petite bretonne est devenue une déesse sans âge. La fumée s'est chargée de leur frêle fragilité de jouvencelle pour la transformer en rocaille où chaque syllabe marque les étapes de leurs vies tumultueuses. À l'une comme à l'autre rien ne fut épargné. Et tout s'entend, nous entrainant dans un monde magique qui leur permit de tirer leur épingle du jeu. Brigitte Fontaine raconte le sien, directe et tordue, avec franchise et arabesques.
Chaque matin de cette semaine, allongé dans le sauna au fond du jardin et donc tout ouïe, j'écoute deux plages de son Portrait de l’artiste en déshabillé de soie. Sa diction me rappelle à la fois Jean Cocteau et Marianne Oswald. Chaque mot semble affublé de son sens, ou du moins de celui qu'elle lui octroie. Elle les mâche pour en tirer le suc, choisissant ses liaisons, aspirées ou allitératives. On entre ainsi dans son univers protégé, qu'impudiquement elle entrouvre pour nous, se réfugiant dans ce qui nous permet de subir ce monde de fous, la poésie.

→ Brigitte Fontaine, Portrait de l’artiste en déshabillé de soie, cd mp3 lu par Brigitte Fontaine, éditions Thélème, 2016