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Le père et le fils ont une plume. Henri Cueco peignait, Pablo Cueco est musicien. Le père avait été l'un des animateurs de la célèbre émission de France Culture, Les papous dans la tête. Je connaissais la prose imagée du fils pour avoir œuvré dix ans avec lui dans le Journal des Allumés du Jazz. Nous avons aussi croisé le faire musical sur scène et sur galette, et j'avais chroniqué en 2018 son savoureux ouvrage sur les comptoirs du 3e arrondissement parisien. A part cela, il faut bien reconnaître que le zarb est le seul instrument à rimer avec barbe, que Pablo entretient comme un jardin.
Bagnoletais, je me souvenais que le plasticien y avait cofondé la Coopérative des Malassis avant que je m'y installe. Georges Aperghis y dirigera l'ATEM, et puis tout disparut, comme les Rencontres chorégraphiques et Lutherie Urbaine. Les incultes nous le font bien sentir aussi à l'échelon national, en cette période aussi absurde que cyniquement organisée, la culture ne serait pas de première nécessité. Méfions-nous de plus belle ! L'art est le dernier rempart contre la barbarie. Quel sort les laquais des banques nous réservent-ils ?

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C'est une autre histoire de banlieue que les Cueco nous content, chacun de son point de vue, Papa avec Le gang des petits vélos, Fiston avec Vol dans la nuit. Le vol à l'arraché est suivi de part et d'autre de petits textes socio-politiques toujours teintés d'humour, là encore en fausse symétrie : le 11 septembre 2001, les manifs... Il suffit de retourner le petit fascicule en champ/contrechamp pour apprécier à quoi tient la mémoire de chacun. Ce délicat hommage d'un fils à son père se lit facilement, comme des bulles de savon irisées dans la nuit désertée, interdite. Tel Henri, tel Pablo, ça se déguste pourtant accompagné...

→ Henri Cueco & Pablo Cueco, Double vue, Qupé éditions, 7€