Après avoir été le jardin de mon enfance, le Palais-Royal est devenu mon ministère. Je ne l'exerce plus guère, mais je ne désespère pas de déclencher la manne providentielle pour monter quelque nouveau projet qui ne se ferait pas sans elle [les équipes qui s'y sont succédées m'ont fait rapidement abandonner cette idée au profit d'une indépendance salvatrice]. Le drapeau flotte sur la marmite tandis que je tourne le dos aux appartements de Colette et Cocteau, aux boîtes à musique Anna Joliet (100 euros la programmable, mais 500 pour les douze sons, c'est trop cher !) et à la rue Vivienne où nous habitions dans un ancien hôtel de chasse de Richelieu [c'était un meublé sous les toits, un bout d'appartement]. Le quartier a bien changé depuis les XVIIe et XXe siècles ! J'allais à la maternelle dans cette même rue... Deux jours avant que le nouveau ministre adorateur de monarchies [Frédéric Mitterrand] n'annonce sa nomination, Antoine et moi l'av[i]ons croisé rue Saint-Honoré en train de faire du lèche-vitrine devant un antiquaire, un barreau de chaise au bec et l'air étonnamment guilleret. Ne pensant qu'à la proximité de notre clapier au Musée des Arts décos, nous avons raté le scoop, ce qui nous fait une belle patte de lapin. C'était probablement son dernier jour de liberté. Pour en revenir aux mammifères à poils que nous gardons [voir notre opéra Nabaz'mob pour 100 lapins connectés alors exposé dans une aile du Louvre], les roses trémières et les roucoulements de pigeons faisaient obstacle à dresser un pont entre l'enfance de l'art et les colonnes du temple, ou l'inverse, soit l'art de l'enfance et le temple des colonnes. Si vous trouvez ce billet ésotérique, mettez-le sur le conte du jeu de mots et de la rêverie bucolique que m'inspire souvent la traversée du jardin, une délicate régression.

Cet article du 10 juillet 2009 me replonge dans une enfance d'un autre siècle. En vieillissant on creuse la terre et, avec un peu de recul, se révèlent des couches géologiques dont on peut admirer la coupe transversale. Le nez collé à la vitre ne permet que de pâles réflexions. Il y a quelque chose de schizophrénique à essayer de se souvenir. En avançant on accumule de nouveaux sédiments, comme aujourd'hui où je rentre à Saint-Louis pour avaler 100mCi d'iode 131 à 3700 MBq.
"L'iode 131 est un des isotopes de l'iode, émetteur β- et γ. Il est obtenu par fission d'uranium 235 ou par bombardement neutronique de tellure stable. La période de l'iode 131 est de 8,06 jours. Il décroît en xenon 131 stable par émission de rayonnement gamma de 364 keV (82%), 637 keV (6,8%) et 284 keV (5,4%) ainsi que de rayonnement β-d'énergie maximale 606 keV, absorbé à 90% sur 0,8 mm de tissu biologique."
Je n'émettrai hélas aucune lumière particulière permettant de faire des photos originales de l'artiste. Par contre, depuis l'annonce de mon cancer thyroïdien je prends l'ensemble des opérations de manière expérimentale, atténuant ainsi autant que possible les répercussions psychologiques ! J'ignore si je pourrai publier de nouveaux articles depuis ma chambre plombée, ou s'il me faudra attendre, jeudi prochain, de sortir de mon isolement.