Sur la Toile, j'ai retrouvé par hasard le film néo-situationniste La dialectique peut-elle casser des briques ? que René Viénet réalisa en 1972 en détournant un film de Hong Kong de Doo Kwang Gee (parfois écrit Kuang-chi Tu). Il doubla les voix en réinventant des dialogues politiques qui mettaient en boîte le Capital et les bureaucrates communistes. Y prêtèrent leurs voix les acteurs Patrick Dewaere, Roland Giraud, Michèle Grellier, Dominique Morin, Jacques Thébault... L'objet amusera ceux qui ont connu les années 60 et 70 et leur effervescence "révolutionnaire", il intéressera peut-être les plus jeunes, d'autant que c'est le premier film de kung-fu dont on parla en France, donc par une version détournée ! Son succès me rappelle celui de la chanson des Inconnus, Auteuil Neuilly Passy, qui fut le premier gros succès de rap alors qu'il s'agissait d'un pastiche.


La sortie d'un dvd de René Viénet est annoncée pour avril 2008. En attendant, je vous livre deux autres extraits de ce drôle d'objet cinématographique, qui complète excellemment l'édition intégrale des films de Guy Debord en dvd.


Viénet se livra ensuite à d'autres détournements de films comme Les filles de Kamaré (1974) à partir d'un film pornographique japonais dont il imagina les sous-titres ou du documentaire férocement anti-maoïste Chinois, encore un effort pour être révolutionnaires, en anglais Peking Duck Soup (1977), deux films que l'on peut regarder, avec l'intégrale de La dialectique, sur le site remarquable ubu.com. Je n'ai hélas pu visionner Une petite culotte pour l’été...
Cet exercice, devenu, depuis, un genre à part entière, fut repris en 1992 sur Canal Plus par Michel Hazanavicius et Dominique Mezerette, qui firent doubler un montage d'extraits de séries télévisées pour composer l'hilarant Derrick Contre Superman : Eine Grosse Fünf.


Suivirent Ça détourne : le triomphe de Bali-Balo et Le grand détournement : La classe américaine, encore plus laborieux et potaches. En 1966, Woody Allen avait lui-même réalisé What's Up, Tiger Lily? à partir d'un film japonais d'espionnage en reconstruisant intégralement la bande-son, insérant de nouveaux plans et réorganisant le montage général. Le détournement fut souvent pratiqué pour désamorcer une pensée en en renversant les valeurs. Ainsi, je me souviens que mon père possédait un livre publié au début de la guerre, intitulé Mein Rampf, qui commençait ainsi : " - Heil Hitler ! - Hitler who ? - It'll amuse you..."