70 Multimedia - janvier 2014 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mercredi 29 janvier 2014

Naissance des inéditeurs


L’accès du grand public à de nouvelles machines technologiques excite chaque fois l’imagination des artistes, leur suggérant des œuvres nouvelles. Comme il en fut des CD-Roms ou d’Internet à leur création les tablettes numériques, et l’iPad en particulier, présentent des espaces de liberté qui seront plus tard engloutis par le commerce et les services. Avant cette récupération inéluctable, les champs d’expérimentation et d’invention s’ouvrent aux rêveurs, constructeurs de nouveaux mondes. À chaque support correspond un type d’œuvres et chaque œuvre implique un support approprié. Aujourd’hui les tablettes permettent de renouer avec l’interactivité en proposant des interfaces sensuelles intuitives. Les inéditeurs, à la fois auteurs et praticiens, ont choisi de travailler ensemble dans un esprit de collaboration ludique et créatif sur des projets utilisant les étonnantes propriétés de ces nouvelles machines. S’ils mettent en commun leurs savoirs et leurs expériences ils souhaitent également les partager avec d’autres auteurs qui trouveront chez eux une écoute et un savoir-faire qui vont de pair. Enfin chaque œuvre prendra tout son sens entre les mains du public grâce aux ressources de l’interactivité qui, comme l’improvisation, réduit le temps ou les distances entre la création, l’interprétation et l’appropriation…


Si le roman multimédia USA 1968 deux enfants est paru il y a quelques jours il aura fallu attendre que notre site soit en ligne pour annoncer la création des Inéditeurs, jeune société d'éditions interactives. Nous avons ainsi choisi de produire ce que nous savons faire, inventer des objets dont nous avons rêvés sans savoir de prime abord s'ils sont viables. Avons-nous ensuite d'autre choix que de trouver une solution pour les faire exister ? J'ai l'habitude de raconter que lorsque je maîtrise un projet je gère, mais sauter dans l'inconnu m'oblige à créer. Loués soient les développeurs qui rendent tangibles nos élucubrations ! Il aura fallu trois ans pour accoucher de USA 1968 deux enfants tel qu'il est, grâce à Sonia Cruchon, Mikaël Cixous, Mathias Franck, et toutes celles et ceux qui y ont participé directement ou indirectement. D'autres applications suivront bientôt : Dig deep est un oracle contemporain utilisant des extraits de films du 20e siècle conçu par Sonia et Au boulot est un conte graphique horizontal pour grands petits hommes illustré par Mikaël. Nous travaillons évidemment tous ensemble sur tous les projets. Le plus agréable est l'ambiance dans laquelle tout se construit, mélange d'excitation contrôlée, de saine impatience et de franche amitié. Nous sommes jeunes, direz-vous, cela explique cela.

samedi 25 janvier 2014

Sun Sun Yip, 20 ans après


Né en 1966 en République Populaire de Chine, à Huhehuote en Mongolie Intérieure, Sun Sun Yip, fraîchement arrivé de Hong Kong où ses parents s'étaient réfugiés en 1973 après de terribles désillusions sur la révolution culturelle, découvrait Paris comme des millions d'autres immigrés avant et après lui. Nous sommes en 1989 et la bourse qu'il a obtenue lui offre un hôtel luxueux pendant le premier mois. Décidé à s'installer dans la capitale, il déménagera ensuite un nombre incalculable de fois, à la recherche d'un abri. Quatre ans plus tard, la première galerie à accueillir son travail est l'Association Culturelle Franco-Japonaise de TENRI, située aujourd'hui près du Châtelet. Exactement vingt ans après, Sun Sun Yip y expose L’âge d’or, rassemblant des œuvres récentes, grands tirages photographiques, sculptures et peintures où les formes semblent se transformer sous nos yeux. Un reflet involontaire projette par terre cet enchevêtrement de lignes lumineuses dont la fixation sur leur support ne peut arrêter le mouvement. Face à ces révolutions où la vie recommence inexorablement lorsque s'achève un cycle, ses crânes célèbrent la perpétuité des vanités. Sun Sun Yip écrit : "Il est impossible pour moi de rester indifférent face aux inégalités sociales, aux systèmes politiques méprisants, aux misères et aux guerres... Cependant j'ai choisi de ne pas exprimer mes colères de manière évidente dans mon art. Je préfère proposer une vision de l'humanité comme faisant partie d'un ensemble beaucoup plus vaste. Cette conception est proche de la philosophie taoïste, une pensée ancienne de 2000 ans qui évoque les règles invisibles de l'univers et l'évolution infinie de la vie..."

Jusqu'au 1er février, lundi 12h-20h, mardi-vendredi 10h-20h, samedi 10h-18h30, le dernier jour seulement jusqu'à 16h, 8-12 rue Bertin Poirée, 75001 Paris.

mardi 21 janvier 2014

Un light-show interactif


Depuis quelques semaines j'illustre de temps en temps mes articles avec des images psychédéliques, captures-écran de la couverture interactive qui ouvre mon nouveau roman, USA 1968 deux enfants, conçu pour iPad. Après avoir terminé la mise en forme du récit j'ai rêvé de recréer l'un de nos light-shows du début des années 70 avec les moyens qui nous sont offerts aujourd'hui.

Cette évocation est la conséquence directe du voyage initiatique entrepris avec ma petite sœur lorsque nous avions 13 et 15 ans, soit trois mois d'un périple extraordinaire autour des États-Unis en 1968, seuls, livrés à nous-mêmes. Je brûlais, grattais, peignais des diapositives sous-exposées depuis déjà trois ans lorsque j'assistai au spectacle du Fillmore West à San Francisco avec le Grateful Dead. En revenant à Paris je fondai H Lights avec quelques amis du Lycée Claude Bernard, raison pour laquelle j'appelai Retour en France cet épisode qui, ouvrant paradoxalement le roman, porte un numéro négatif comme tous ceux qui précèdent notre départ pour New York. S'il figure tout autant l'épisode 37 qui clôt l'aventure il renvoie le récit principal à un immense flash-back.

H Lights projetait des diapositives, des liquides en ébullition, des images cinétiques ou polarisées sur des groupes pop de l'époque tels Gong (Daevid Allen), Red Noise (Patrick Vian), Crouille-Marteaux (Pierre Clémenti, Jean-Pierre Kalfon), Melmoth (Dashiell Hedayat), Dagon (les frères Lentin), Epimanondas (mon premier groupe avec Francis Gorgé), etc. Il s'agissait de reproduire sur grand écran les expériences hallucinogènes que les substances illicites nous avaient laissés entrevoir. Ici le plaisir est offert au lecteur qui, en touchant d'un doigt l'écran de l'iPad, contemple un spectacle infini tant les médias et les combinaisons sont nombreuses. Sonia Cruchon a récupéré des extraits de mes films qu'elle a mis en boucle et filmé les effets de matière tandis que Mathias Franck fabriquait le moteur de l'œuvre interactive. Au simple tap il a ajouté la programmation des glissés pour changer les filtres et un double-tap pour envoyer les images capturées en direct à l'album-photos de l'iPad de manière à ce que chacun puisse immortaliser les tableaux qu'il ou elle aura générées.

Dans un premier temps j'avais créé une partition musicale également interactive, mais l'objet était devenu trop complexe. Aussi ai-je choisi des musiques présentes dans le récit proprement dit tant et si bien que le lecteur se retrouve dans la position où nous étions lorsque nous improvisions le jeu des images d'après la musique. De la même façon que la couverture du roman est différente à chaque lancement de l'application la musique est piochée aléatoirement dans le corpus sonore, produisant ainsi des effets de sens toujours différents.
Excités par le résultat, nous avons décidé que les créations numériques pour tablette publiées à l'avenir par Les inéditeurs porteraient toutes une couverture interactive !

vendredi 17 janvier 2014

USA 1968 deux enfants


Mon second roman USA 1968 deux enfants paraît enfin après trois ans de travail ! L'objet est un roman augmenté conçu pour iPad, avec une couverture interactive, 12 courts métrages, 75 minutes de musique et de son, quantité de photographies, la carte interactive du périple, etc. Cette aventure éditoriale n'aurait pas été possible sans la collaboration extraordinaire des Inéditeurs, société d'éditions interactives que nous avons constituée avec Sonia Cruchon, Mikaël Cixous et Mathias Franck.


À l'été 1968, deux enfants de treize et quinze ans parcourent seuls les États-Unis. Lorsqu'ils ne trouvent personne pour les loger, ils voyagent de nuit grâce à un abonnement aux bus Greyhound. Des chutes du Niagara à la frontière mexicaine, de l'Océan Pacifique à la Nouvelle Orléans ils font d'incroyables rencontres. Hébergés par un pathologiste à El Paso, un couple d'architectes à Beverly Hills, des hippies et le médecin des Black Panthers à San Francisco, des fascistes dans le Connecticut ou le patron de la Bourse de New York, des familles les accueillent lors d'un voyage initiatique où l'auteur découvrira sa passion pour la musique après avoir participé aux évènements de mai à Paris deux mois plus tôt. Le journal de ce périple renvoie au passé qui a permis cette incroyable aventure comme à l'avenir qu'il suscitera. Une époque pleine de promesses se dessine avant que la réaction n’enterre les rêves de cette jeunesse qui pensait pouvoir réinventer le monde.


Sous l'onglet du générique j'espère n'avoir oublié personne tant ils et elles sont nombreux à y avoir participé ou m'y avoir encouragé. Une dédicace spéciale à ma petite sœur qui a partagé ce voyage initiatique extraordinaire, à ma fille qui m'a accompagné sur cette même route trente-deux ans plus tard, à mes parents qui ont eu la folie de nous laisser partir seuls et si loin, à François Bon qui m'a mis le pied à l'étrier avec mon premier roman augmenté, La corde à linge, aux musiciens qui sont présents sur la partition sonore, à Françoise qui a monté les films, à Sonia qui a réalisé avec moi le light-show interactif et qui a soutenu ce projet depuis le début, à Mikaël qui s'est chargé du graphisme et des illustrations et à Mathias qui a réussi à ce que l'application tienne debout !