70 Multimedia - septembre 2019 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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samedi 21 septembre 2019

Nonself Remix (Birgé-Sanborn)


Pari réussi hier soir au Blackstar. Je regrette de n'avoir pas enregistré. 62 minutes pendant lesquelles mes pieds ne touchaient plus terre. J'en ai oublié mes douleurs lombaires.


Mon installation a fonctionné. C'est souvent une question de disposition dans l'espace, comme pour un batteur ou un guitariste distribuant ses pédales d'effets autour de lui. J'avais tout à ma main, même si j'en manquais. J'aurais aimé en avoir quatre. Pour une fois les pédales de volume et de sustain de mon clavier auront été utiles. C'est surtout une affaire d'écoute. Quand c'est confortable, on peut contrôler tous les paramètres du son, ce qui est crucial pour une improvisation.


Mon petit poème symphonique attribuait un sens nouveau aux images de John Sanborn. J'ai eu l'impression de commettre un remix brechtien de son montage déjà fortement critique. Comme une mise en abyme de poupées gigognes qui n'en finiraient pas de grandir/rapetisser. Simultanément, du microscope électronique à la Terre vue de la Lune.


Derrière moi s'affichait le portrait de Lemmy Kilmister, le bassiste et chanteur du groupe de heavy metal Motörhead ! Sur l'écran John Sanborn psalmodiait tel le récitant d'un opéra multimédia. À suivre...

Photos : Dana Diminescu

vendredi 20 septembre 2019

Je joue Nonselves avec John Sanborn, ce soir au Blackstar


À sa conférence de mardi au Jeu de Paume, John Sanborn jouait avec la vérité comme un chat avec une souris. La vérité de soi. Qui on est, qui l'on n'est pas. C'est l'en-jeu de son Nonself, portrait en creux basé sur le rejet. Or, si l'on suit Jacques Lacan avançant que l'inconscient ignore les contraires, on se focalisera sur le choix des sujets et non sur leur affirmation ou leur négation. Ce qui nous préoccupe fait sens. Tous les doutes sont permis au je du J'aime/J'aime pas. John Sanborn a supprimé les titres (adjectifs précédés de not) du montage des séquences qu'il m'a fourni. Le melting not en devient un melting pot où les plans jouent à saute-mouton pour retrouver un impossible équilibre. Chacun, chacune, ressentira ainsi à sa manière les sentiments d'acceptation et de rejet que les vidéos provoquent. La musique improvisée que j'ai imaginée participe à ce grand chambardement. Elle accentue, contrarie, transforme le regard porté sur notre société saturée d'images, comme Sanborn le suggère dans son accumulation de signes.
J'ai rarement eu autant de mal à préparer un concert. Jouer sur le montage d'une heure des 122 vidéos de John Sanborn m'a obligé à jongler avec le chronomètre, la projection, les chargements de banques de sons tandis que je continue à frapper mon clavier ; de plus, je dois mixer l'instrument avec le montage radiophonique des années 80 et les sons synchrones de Sanborn. Ses séquences ultracourtes divisent parfois l'écran en deux ou trois panneaux séparés. Je dois posséder quatre bras, jouir d'un strabisme divergent et d'une schizophrénie passagère pour conjuguer l'ensemble ! Le solo est un exercice difficile lorsqu'on joue d'instruments électroniques exigeant que l'on regarde les écrans et qu'on lâche de temps en temps le clavier pour le trackpad. Fin octobre à Vienne en Autriche j'ai demandé à Walter Robotka de me faire rencontrer quelqu'un pour éviter la solitude du coureur de fond ; je partagerai donc la scène avec le performeur Didi Bruckmayr sans le connaître. Le mode de la conversation l'autorise ! Mais ce soir au Blackstar je devrai faire l'acrobate sans perdre le fil sensible de ce montage aussi politique qu'esthétique. Cette semaine j'ai trouvé quelques astuces pour que l'ensemble se tienne. J'ai par exemple ajouté une petite réverbération sur les sons synchrones afin qu'ils s'intègrent mieux à mon jeu, et minimisé, soit mieux localisé, les interventions de la radiophonie. Cette salade sera imperceptible au public dont les yeux seront rivés à l'écran de Led géant. Si le son a l'avantage d'être évocateur, l'image focalise massivement l'attention des spectateurs...

→ Vendredi 20 septembre au Blackstar, 6 passage Thiéré, 75011 Paris
20h : ouverture des portes
20h15 John Sanborn Pensées Aléatoires du Futur
21h : le chanteur Pierre Faa accompagné par Paul Abichared
21h45 : vidéos d'Agnès Guillaume, Sarah El Hamed, Héloïse Roueau
22h30 : Nonselves, performance de Jean-Jacques Birgé sur 122 vidéos de John Sanborn
23h30 John Sanborn The Temptation of St. Anthony
Minuit : DJ et video de Marcus Kreiss Souvenirs from Earth
Entrée 10€ allant aux musiciens (chèque ou liquide) / au bar CB acceptée !

mardi 17 septembre 2019

Improvisation live sur NonSelf de John Sanborn (vendredi)


Le vidéaste américain John Sanborn m'a demandé d'accompagner en public 122 vidéos de son projet NonSelf. Tandis qu'il les présente au Jeu de Paume (et dans leur espace virtuel jusqu'en novembre) sonorisées par ses soins, je recrée intégralement la partition sonore de ce « non-autoportrait d’attributs inversés » vendredi prochain au Blackstar à Paris. Composer une heure de ce maelström maximaliste n'est pas une petite affaire !


J'ai choisi d'unifier l'ensemble au clavier avec des orchestrations néanmoins très variées, depuis des ambiances électro-acoustiques jusqu'à un orchestre symphonique en passant par des instruments de percussion et des guitares électriques rock en diable. L'élément le plus original de mon improvisation est une radiophonie réalisée en 1980, plunderphonics avant la lettre, qui découpe l'espace-temps de manière encore plus éclatée, sorte de fractales sonores du montage explosif de John Sanborn. Il me restera à mixer ces deux sources avec quelques évènements synchrones de la vidéo originale, en particulier lorsque l'on voit des personnages parler à l'écran.


Je me demande encore combien de mains il me faudra pour réussir ce tour de force, mais j'adore relever des défis qui me paraissent de prime abord impossibles. Le côté godardien (celui des Histoires du cinéma et du Livre d'image) de Sanborn me séduit par ses évocations narratives. L'afflux de sens monte à la tête, chacun ou chacune y découvrant les portes de la perception vers l'inconscient de l'artiste comme dans le sien propre.


Je me suis passé et repassé les 122 vidéos où la tendresse et la beauté rivalisent avec les provocations toujours teintes d'humour caustique. L'œuvre de John Sanborn est fondamentalement politique, au sens où l'entendent ceux et celles de sa génération qui étaient déjà actifs dans les années 70. Oui, "tout est politique " !


J'ai structuré ma création d'une heure, de manière à alterner les ambiances calmes et excitées. J'avais pensé à une forme sonate, mais je ne pense pas m'y cantonner lorsque je serai en scène, absorbé par les images et concentré sur ma performance shivaïque...


Vendredi 20 septembre au Blackstar, 6 passage Thiéré, 75011 Paris
20h : ouverture des portes
20h15 John Sanborn Pensées Aléatoires du Futur
21h : le chanteur Pierre Faa accompagné par Paul Abichared
21h45 : vidéos d'Agnès Guillaume, Sarah El Hamed, Héloïse Roueau
22h30 : Nonselves, performance de Jean-Jacques Birgé sur 122 vidéos de John Sanborn
23h30 John Sanborn The Temptation of St. Anthony
Minuit : DJ et video de Marcus Kreiss Souvenirs from Earth
Entrée 10€ allant aux musiciens (chèque ou liquide) / au bar CB acceptée !