Les cloches d'Atlantis, sous-titré Musique électroacoustique et cinéma et Archéologie et histoire d’un art sonore, fait partie de ces ouvrages rares et indispensables pour quiconque s'intéresse au son et plus encore à son rapport à l'image. Le livre de Philippe Langlois comble un vide que ceux de Michel Chion n'ont fait qu'effleurer d'une mainmise exagérée sur le sujet. L'écriture est claire, les exemples concrets, la quantité généreuse et les pistes multiples, même si j'ai noté ici et là quelques erreurs, approximations ou omissions malheureuses, mais quelle encyclopédie y échappe ? Ajoutez un site Internet avec plus d'une soixantaine d'extraits de films relatés dans ces 480 pages, quelques extraits sonores et vous pouvez compter sur cette somme comme sur Le traité des objets musicaux de Pierre Schaeffer, Acoustique et musique de Émile Leipp, Praxis du cinéma de Noël Burch, les écrits d'Edgard Varèse, Arnold Schönberg ou Jean Epstein, sans oublier le CD-Rom d'Olivier Koechlin sur La musique électroacoustique et quelques autres incontournables vers lesquels vous reviendrez tout au long de votre vie !
Un autre ouvrage reste néanmoins à écrire, car Philippe Langlois privilégie ici les faits plutôt que la recherche du sens, les réflexions théoriques se retrouvant atomisées au fil des pages. Les propriétés intrinsèques du son dans l'audiovisuel sont seulement esquissées dans le chapitre sur le cinéma d'auteur, en particulier avec les films de Tarkovski, Kobayashi ou Lynch, et dans son commentaire sur les travaux de Michel Fano sur la partition sonore. L'archéologie s'arrête où commence la pratique. Les cloches d'Atlantis sont une bonne base pour imaginer l'avenir en connaissance de cause, des fondations qu'il serait dommage de passer sous silence. Dans une première partie où il évoque d'abord longuement les futuristes italiens et russes l'auteur inventorie la nouvelle lutherie du XXe siècle quand déjà celle du nôtre la range au musée. La seconde s'intéresse aux dispositifs sonores au cinéma jusqu'en 1950 quand les suivantes abordent les musiques électroacoustiques au cinéma. Le court épilogue sur notre actualité ne peut que laisser sur sa fin, écrivez ce mot comme vous l'entendez, tant l'évolution des nouvelles technologies des vingt dernières années a bouleversé la pratique sans hélas faire progresser l'intelligence, à savoir l'utilisation du son dans sa complémentarité avec l'image, son pouvoir d'évocation et l'immense champ inexploré que sa syntaxe pourrait offrir aux amateurs de sens.