70 Musique - février 2013 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mercredi 27 février 2013

L'argent de M. L'Herbier par Un d.m.i. (1988)


Rien n'a changé depuis le krach de l'Union Générale de 1882 et le scandale de Panama de 1888 qui inspirèrent Émile Zola pour L'argent. Rien n'a changé des mécanismes boursiers depuis que l'écrivain les décrivit dans son roman publié en 1891, dix-huitième volume de la série des Rougon-Macquart. Rien n'a changé depuis l'adaptation sublime que Marcel L'Herbier en fit pour le cinématographe en 1928 à la veille du krach boursier. Rien n'a changé depuis celui d'octobre 1987 lorsque nous travaillions sur la musique du film de L'Herbier pour le centenaire du cinéaste. Rien n'a changé, si ce n'est le peu d'audace du cinéma actuel en comparaison des inventions de ce qu'il est aujourd'hui coutume d'appeler la Première Vague à laquelle appartenaient aussi Jean Epstein, Germaine Dulac, Louis Delluc... L'argent est un chef d'œuvre de 3h14, durée bollywoodienne qu'à ma grande surprise YouTube accepta sans rechigner. Si Un Drame Musical Instantané interpréta beaucoup plus souvent Le cabinet du Docteur Caligari, La glace à trois faces ou La Passion de Jeanne d'Arc, des 26 films que nous mîmes en musique depuis 1976 c'est probablement, avec L'homme à la caméra, le plus réussi de nos ciné-concerts.


Composée par Bernard Vitet (trompette, bugle, violon, trompette à anche, piano, percussion), Francis Gorgé (guitare électrique, synthétiseur, échantillonneur, valse, percussion) et moi-même (synthétiseur, échantillonneur, harmoniser, reportages, flûte, voix, inanga, percussion), la musique sait jouer des silences, évitant la logorrhée des versions du Napoléon de Gance dues à Carmine Coppola ou à Carl Davis. Comme avec L'homme à la caméra composée pour un orchestre de 15 musiciens, la partition de L'argent pour notre trio évite toute nostalgie pour propulser le chef d'œuvre de L'Herbier à notre époque, en soulignant ainsi l'actualité tant formelle que narrative. Enregistré par mes soins au Studio GRRR à Paris le 2 mars 1988, la création eut lieu les 21 et 22 janvier précédents au Théâtre À Déjazet. Avant de mettre le film en ligne j'en avais édité les meilleurs extraits pour constituer un disque qui resta également dans nos cartons jusqu'à sa publication virtuelle, gratuite en écoute et téléchargement sur drame.org.

Photo d'Un d.m.i. © Jean-Jacques Henry

lundi 25 février 2013

Sarajevo Suite (live 1994)


Je fouille, dépoussière, éternue, exhume, exulte enfin lorsque je découvre les archives vidéographiques laissées de côté depuis tant d'années. J'avais bien mis en ligne sur YouTube, DailyMotion ou Vimeo quelques petits machins, extraits "vus à la télé", entretiens, conférences, home movies, répétitions, témoignages divers et variés d'un workaholic, mais certains documents m'avaient échappé. Ou bien leur durée semblait incompatible avec le Web... 66 minutes pour L'homme à la caméra, 57 minutes pour J'accuse, 2h16 pour Sarajevo Suite, 3h14 pour L'argent ! La progression est exponentielle. La chasse au trésor se révèle plus miraculeuse que la création d'emplois. Raison de plus pour prendre le temps de numériser ces VHS rangées sur une étagère inaccessible sans une dangereuse escalade. Je pense à Charles Valentin Alkan, le Berlioz du piano, écrasé par sa bibliothèque en cherchant à attraper un exemplaire du Talmud !


Claude Piéplu accepte de jouer le récitant de l'unique concert donné à l'occasion de la sortie du CD Sarajevo Suite au Festival des 38e Rugissants à Grenoble le 30 novembre 1994. André Dussollier et Jane Birkin avaient tenu ce rôle sur le disque dont je m'étais occupé avec Corinne Léonet. Je mets donc en scène la soirée. Interviennent par ordre d'apparition : Piéplu, Pierre Charial, Un Drame Musical Instantané, Bernard Vitet, Kate Westbrook, le Balanescu String Quartet (Alexander Balanescu, Clare Connors, Andrew Parker, Sian Bell), Henri Texier Azur Quintet (Bojan Z, Noël Akchoté, Sébastien Texier, Tony Rabeson), Gérard Siracusa, Mike Westbrook, Chris Biscoe, le film Le Sniper de J-J Birgé, Lindsay Cooper Quintet, Thomas Bloch, Phil Minton, Dean Brodrick, la voix d'Abdulah Sidran, auteur bosniaque des poèmes qui ont inspiré les divers compositeurs...

Dix-huit ans plus tard, la Planète Sarajevo qu'évoque Claude Piéplu a d'absurdes résonances Shadok. La prophétie s'est vérifiée. Le monde marche sur la tête. Le siège aura marqué le retour d'une barbarie décomplexée, le blanc-seing aux pires atrocités sans que quiconque ne bouge. Au moment de l'enregistrement l'heure est grave. Il s'agit de reconstruire la ville, mais qu'en est-il des habitants ? Ce qui était le sujet de la série télévisée Chaque jour pour Sarajevo à laquelle j'avais participé se retrouve dans le ton des artistes présents sur la scène du Cargo. Ils se succèdent sans temps mort. C'est réglé comme du papier à musique, sauf qu'ici tout se fait de tête et avec le c?ur.

vendredi 22 février 2013

J'accuse...! (1989)


Les archives se suivent, mais ne se ressemblent pas. 1989, c'était le Bicentenaire de la Révolution française. Trois ans avant de monter Le K avec Richard Bohringer qui nous valut une nomination aux Victoires de la Musique, nous avions choisi l'acteur pour incarner Émile Zola dans son célèbre pamphlet J'accuse, modèle du genre et article historique de 1898 sur le racisme et l'antisémitisme publié à l'occasion de l'affaire Dreyfus. L'article était paru sous la forme d'une lettre ouverte au président de la République française, Félix Faure, dans le journal L'Aurore. Un film de notre spectacle avait été tourné, mais personne ne le vit jamais, du moins à ma connaissance.


Ce 18 novembre 1989, Christian Gomila tourna le spectacle à cinq caméras, mais la coupure des instrumentaux au montage me contraria tant que j'oubliai le film dans sa boîte jusqu'à aujourd'hui. Dommage, car la captation donne une bonne image du genre de spectacle que nous montions à cette époque, même si l'orchestre frigorifié jouait complètement faux !
Avec Bernard Vitet et Francis Gorgé nous avions choisi d'accompagner un texte pour changer de nos ciné-concerts qui commençaient à devenir à la mode. Notre trio d'Un Drame Musical Instantané en composa donc la musique. Arnaud de Laubier nous présenta le metteur en scène Ahmed Madani qui apportait dans sa musette le scénographe Raymond Sarti, le créateur lumière Thierry Cabrera et la costumière Malikha Aït Gherbi. De notre côté nous amenions Bohringer alors au plus haut de sa cotte de popularité, la chanteuse Dominique Fonfrède et les 70 musiciens de l'Orchestre Départemental d'Harmonie des Yvelines dirigé par Jean-Luc Fillon !


Raymond Sarti avait collé un chapiteau gonflable de cinq étages de haut le long de l'une des tours de Mantes-la-Jolie destinée à être détruite. La façade de l'immeuble comme l'ancien parking ainsi recouverts étaient entièrement bleus avec de grosses croix blanches ici et là. Il avait fait creuser une tranchée pour notre trio, monter une colline pour l'orchestre et empiler des sacs de jute au milieu de la scène. Des croisillons plantés dans la terre donnaient au décor des allures de Verdun. Tout avait été repeint, un étrange mélange de Yves Klein, Christo et Kubrick ! Richard arpentait les étages jusqu'aux balcons. Son rôle lui permettait les envolées lyriques qu'il affectionnait. La même année, nous avions repris la partie de l'orchestre sous le titre de Contrefaçons à la Maison de la Radio. Comme d'habitude, Bernard Vitet jouait des trompettes, Francis Gorgé des guitares, et j'étrennai mon synthétiseur Ensoniq VFX-SD.
De même que nous avions choisi une image du Ku Klux Klan pour annoncer le spectacle, nous avions demandé à Dominique de reprendre Der Hass ist der Armen Lohn que je chantais dans l'album Kind Lieder, histoire d'universaliser notre propos. Comme nous jouions au milieu des tours de Mantes, Ahmed Madani avait engagé comme service d'ordre les gars plus méchants de la cité, ce qui n'empêcha pas la femme du vice-président de Louis Vuitton, dont la Fondation pour l'Opéra et la Musique nous aidait, de recevoir un caillou sur la tête ! Cela marqua la fin de notre collaboration ! Trois ans plus tard, Dominique Cabrera tourna Chronique d'une banlieue ordinaire sur les anciens habitants de la tour qui allait être détruite et j'en composai la musique...

mercredi 20 février 2013

L'homme à la caméra par Un Drame Musical Instantané (1983)


Trente ans déjà. Trente ans pour nous, mais quatre-vingt-quatre pour Dziga Vertov puisque L'homme à la caméra date de 1929. Nous avions choisi son Laboratoire de l'Ouïe comme modèle à nos élucubrations. Plutôt qu'illustrer platement le film nous avions préféré inventer de nouvelles formes, dévorant le livre de Georges Sadoul et, surtout, les écrits du cinéaste. Si la création eut lieu à l'occasion du Festival Musica à Strasbourg le 5 octobre 1983, le grand orchestre d'Un Drame Musical Instantané enregistra notre partition originale le 14 février 1984 au Théâtre À Déjazet à Paris lors de la quatrième représentation. Avec Francis Gorgé et Bernard Vitet, nous partagions la direction de l'orchestre composé de quinze musiciens et musiciennes. L'électronique se mêlait aux vents, aux cordes, aux percussions et à une lutherie originale inventée par la flûtiste Hélène Sage et Bernard. J'avais même écrit des chansons pour lui, pour la contrebassiste Geneviève Cabannes, et pour le violoncelliste Didier Petit dont c'était la première vocale. Le document n'est pas d'une qualité exceptionnelle, mais sa rareté et son antériorité sur nombreuses compositions qui suivirent m'ont semblé justifier sa mise en ligne. J'avais publié une répétition de l'orchestre datant de 1986, mais l'archive présentée ici était passée à la trappe. N'ayant pu filmer le spectacle dont la première partie consistait en la partition seule sans le film suivie du ciné-concert, j'avais à l'époque remonté la musique directement sur la VHS avec le bouton de pause afin de la resynchroniser. La copie 16mm avait été projetée sur le mur du salon ! Le résultat est là, 1h06mn :



Je n'aurais jamais imaginé exhumer cette archive si une étudiante en Master Recherche en Musicologie ne m'avait interrogé sur ses difficultés à synchroniser notre disque avec le film. Je crois comprendre que son travail consiste à comparer les différentes versions que ce chef d'œuvre cinématographique inspira. Un vinyle 33 tours 30 cm ne pouvant contenir toute la partition, nous avions été obligés de couper. Notre mémoire n'avait retenu que l'enregistrement discographique laissant dans l'ombre nombreuses parties.

La composition musicale était signée du Drame, soit Bernard Vitet, Francis Gorgé et moi-même, sauf une petite séquence due à Hélène Sage. L'orchestre était donc composé de Francis Gorgé (direction, guitare électrique, frein), Bernard Vitet (trompettes, trompette à anche, double bombarde, flûte, voix) et moi (direction, synthèse numérique en temps réel, reportages, piano, trompette à anche, flûtes, guimbarde, mélodica, voix), plus Youenn Le Berre (flûtes, flûte électrique, basson, saxophone ténor), Magali Viallefond (hautbois, cor anglais, flûte, tôle à voix, orgue de cristal), Hélène Sage (flûtes, voix, clarinette basse, glissarinette, bouilloire, bazar), Patrice Petitdidier (cor d'harmonie), Philippe Legris (tuba), Jacques Marugg (vibraphone, marimba, percussion), Gérard Siracusa (percussion, marimba), Bruno Barré (violon, violon à pavillon), Nathalie Baudoin (alto), Marie-Noëlle Sabatelli (violoncelle), Didier Petit (violoncelle, voix), Geneviève Cabannes (contrebasse, clavier, voix). Daniel Deshays enregistrait le son, Serge Autogue l'amplifiait.

En 1971, L'homme à la caméra est le premier film qui nous fut montré un matin à la Cinémathèque Française lorsque j'entrai à l'Idhec. Dans la grande salle du Trocadéro quasiment vide mes gargouillis dans le ventre me semblaient briser son mortel silence et m'empêchèrent de jouir du spectacle. C'est probablement de cette expérience douloureuse qu'est née chez moi l'idée d'accompagner les films muets par de la musique jouée en direct, comme nous le fîmes dès 1976 avec plus d'une vingtaine à notre répertoire. Je ne compris que plus tard l'immense influence que le chef d'œuvre de Vertov eut sur moi, tant dans ma musique que dans ma vie.

mardi 19 février 2013

2 nouveaux albums chez GRRR : Solo dépaysage et Pozzallo


Pozzallo et Solo dépaysage sont les quatrième et cinquième albums chez GRRR auxquels je participe depuis le début de l'année après dans tous les sens du terme avec Vincent Segal et Antonin-Tri Hoang, Récréation avec Alexandra Grimal, Rêves et cauchemars avec Edward Perraud et Antonin-Tri Hoang. En cette période de vaches maigres, travailler, créer, rêver, s'activer restent les meilleurs remparts contre la déprime. Trois de ces cinq disques virtuels ont pourtant été enregistrés en concert moyennant salaire, mais les tarifs sont à la baisse et, même avant les restrictions budgétaires, il faut jouer énormément pour arriver à boucler son mois. Seules les commandes assurent un revenu décent. Tandis que certains préfèrent se tirer dans les pattes plutôt que profiter de la solidarité, se retrouver pour des créations collectives est un plaisir absolu. Toutes les séances et les spectacles enregistrés ici furent des moments de grâce, des arrêts du temps qui tendaient vers l'infini, des tranches de gâteau comme les appelait Jean Renoir, plus délicieuses encore que des tranches de vie.

Il en fut donc ainsi de la rencontre du plasticien Nicolas Clauss et moi-même avec le compositeur-clarinettiste Sylvain Kassap avec qui ni l'un ni l'autre n'avions jamais joué sérieusement, mais que nous avions souvent évoquée. Pour cette création organisée à Aix-en-Provence par Seconde Nature, Sylvain avait apporté sa clarinette et son ancêtre le chalumeau, sa clarinette basse et deux Kaospads dans lesquels il pouvait également diffuser quelques sons préenregistrés sur son iPhone. De mon côté je jouais essentiellement d'un clavier commandant divers instruments virtuels tels glassharmonica, piano électrique préparé (Arpettes) ou même orchestre à cordes (Pozzallo). J'utilisai le Tenori-on pour la pièce répétitive Entraves et transformai les sons interactifs de Nicolas sur Jumeau Bar et Fès ou la clarinette basse de Bâches avec mon H3000. La première partie se déroula comme sur des roulettes, mais Nicolas appuya malencontreusement sur la touche de son clavier numérique au début de la seconde, générant chez lui une panique l'obligeant à redémarrer toutes les machines alors qu'il eut suffi de réappuyer sur la touche fatale ! Au grand soulagement de tous, le spectacle s'étala à nouveau sur les trois grands écrans, détails retravaillés en direct de la scène capitale, un orage en pleine mer que j'accompagnai également du son d'un naufrage, paraphrasant l'accident dont nous venions de sortir plus ou moins indemnes. En rappel, nous reprîmes Pozzallo (qui donne son titre à l'album) en remplaçant le calme adagio de la première partie par une rythmique brutale avec Sylvain éructant dans son instrument comme un damné, manière vigoureuse de terminer une soirée riche en surprises et dont l'enregistrement rend bien la complicité lyrique et les évocations quasi radiophoniques.


Le précédent album fut aussi enregistré en public, cette fois dans le cadre d'I.R.L. Performances à Paris et en binôme avec le vidéaste Jacques Perconte. J'ai déjà raconté mon peu d'appétence pour le solo, mais à la réécoute je comprends que je fus le seul frustré de la soirée, les spectateurs ne pouvant être conscients de mes réserves, puisqu'elles concernaient mes difficultés techniques à me déhancher comme un malade pour que les spectateurs puissent jouir au mieux de la composition musicale que j'improvisais en suivant la projection. Une fois n'est pas coutume, Solo dépaysage est donc une expérience que je peux enfin partager en toute quiétude, mais que je ne souhaite pas reproduire, préférant de très loin accompagner en trio les manipulations en temps réel de notre camarade vidéaste comme prévu le 4 juin prochain à Pantin par le Festival Côté Court.

Sur drame.org, en marge des disques physiques (LP et CD) vendus sur le site, 43 albums (97 heures de musique inédite) sont offerts gratuitement en écoute et téléchargement, avec possibilité de faire une donation par PayPal ;-) En page d'accueil réside une radio aléatoire tandis que chaque album est accessible indépendamment...

vendredi 8 février 2013

J'ai fait un rêve...


Improviser avec des musiciens pour la première fois comme si on se connaissait depuis vingt ans ressemble à se faire un ami à la minute de la première rencontre. Le coup de foudre pour un amour est autrement plus complexe, les enjeux ne sont pas les mêmes, les contingences imposent des exigences, l'exclusivité semble incontournable sur la durée. Chaque année je gagne un ami très cher et j'en perds un. Le nombre des vrais amis change peu. Ces derniers temps j'ai multiplié les expériences musicales avec des artistes hors pair avec qui je me suis entendu comme avec d'autres moi-mêmes. Heureusement j'ai plusieurs visages et chacun ou chacune réfléchissent cette diversité. Birgitte Lyregaard et Sacha Gattino, Eve Risser et Yuko Oshima, Antonin-Tri Hoang et Vincent Segal coulent dans mes veines telle une famille recomposée. Les cousins, les cousines vivent leurs propres histoires auxquelles je me confronte également avec bonheur, Linda Edsjö, Alexandra Grimal, Ravi Shardja... Je ne cite ici que les plus récentes de mes aventures musicales.
La dernière en date eut lieu sur la scène du Triton jeudi 31 janvier. Ni Antonin ni moi n'avions jamais joué avec le percussionniste Edward Perraud. Je ne dis pas batteur tant la richesse de ses timbres dépasse de très loin le son des peaux et des cymbales. Face à l'une de mes propositions instantanées il n'imite jamais, il orchestre. Ses gestes ont la précision d'un horloger lewiscarrollien et la vitesse qu'octroie la précision de ceux qui savent ce qu'ils veulent. Comme prévu nous avons interprété chacun trois de nos rêves. Pour le dixième, nous avons invité les spectateurs à venir nous raconter l'un des leurs. Sur l'album mis en ligne le lendemain-même de la création (écoute et téléchargement gratuits sur drame.org) Catalina présente le sien avant que nous en improvisions son évocation musicale. Et mon tout dessine le onzième. Edward, le premier, a évoqué notre rencontre comme un rêve tandis qu'Antonin suggérait que ce concert magique avait rechargé ses batteries. Forcément à suivre...

mercredi 6 février 2013

ilo lympia de Camille


Camille prend toute sa dimension en spectacle. CD et DVD en témoignent dans son nouvel album, double et doublé, audio seul, visuel ajouté sur la seconde galette. ilo lympia reprend les chansons de ilo veyou plus les précédents Ta douleur, Janine, Paris, Cats and Dogs, Pâle septembre, Au port, Wet Boy, Le banquet... En prime sur la version vidéo, un délicat Que je t'aime qui souligne le lien de la chanteuse inventive avec le rock et la chanson française. Après la disparition physique ou artistique de Bashung, Rita Mitsouko et Noir Désir, elle incarne la relève la plus authentique et la plus originale. Je n'oublie pas les chanteuses plus expérimentales qui ont montré la voie comme Brigitte Fontaine, Élise Caron et toutes les géniales improvisatrices déjantées, mais on sent ici l'énorme potentiel d'une jeune femme qui allie musiques savante et populaire, toujours prête à nous surprendre. Espérons-le après la déception du médiéval Salon des refusées de Claire Diterzi, très en retrait du foisonnant Tableau de chasse et même de Rosa La Rouge.
Le film montre une Camille galvaniseuse de foule, exubérante, drôle et généreuse. A capella ou soutenue vocalement par seulement trois complices, son compagnon et musicien contemporain Clément Ducol (guitare et piano) ainsi que le fidèle Martin Gamet (contrebasse et piano) et l'éclectique Christelle Lassort (violon et piano), elle allume un superbe feu d'artifice dont elle assure elle-même la mise en scène sous la lumière de Damien Dufaitre et scénographiée par l'extravagante Robyn Orlyn. De plus, ce spectacle cousu main est remarquablement filmé par Jérémiah, ce qui ne gâte rien !

mardi 5 février 2013

Basse destroy


L'album Solo de la jeune Fanny Lasfargues est un concentré d'énergie, galette explosive où la contrebasse ou la basse électroacoustique explorent la matière noire lovée entre la théorie des cordes et l'électricité des effets de bord. Le voyage à bord du vaisseau spécial s'accompagne de heavy brutal et d'une sensibilité féminine (bien sûr que ça existe !) qui ne gâche pas son jeu. Le métal en fusion crée des impatiences musculaires telles qu'il faudrait inventer de nouvelles danses pour que nos bras et jambes puissent remuer à mesure (Coax Records).

vendredi 1 février 2013

Récréation avec Alexandra Grimal


Ça ne chôme pas, même si l'argent ne rentre pas. J'ai mis un drain sur mon matelas de sécurité et en avant la musique ! Pour patienter en attendant le coup de fil salvateur de Monsieur De Mesmaeker, j'enregistre le second album de ma collaboration avec la saxophoniste Alexandra Grimal. Après Transformation au soprano, elle a choisi le ténor pour le volume 2 intitulé Récréation.
Son timbre donne tout de suite une coloration jazz à nos élucubrations alors que mon jeu au piano préparé ne swingue pas une cacahuète. Les références au rock, à l'Orient, au cinéma et à la musique classique contemporaine sont toujours plus présentes dans mon inspiration. À côté du V-Synth j'utilise surtout le piano préparé virtuel réalisé par l'Ircam. J'ai pané techniquement les enregistrements où Alexandra lisait certains de mes poèmes, mais il reste , un texte écrit sur Internet en 2005 que je lis en rappelant les conditions météorologiques de notre séance. Après le duo de canards Cols Verts j'aime beaucoup Lanterne qui ferme le ban avec l'EP73 déglingué de Sonic Couture. Comme il est court et que le système automatique l'autorise j'écoute l'album en boucle sans ne plus savoir où cela commence. En fait je découvre ce que nous avons improvisé au moment du mixage. Pendant l'enregistrement je suis sur un petit nuage ou sur le bord d'un toit et j'avance en somnambule sans évaluer les risques. Alexandra trouve très drôle le résultat de cette seconde rencontre. En tout cas ça réchauffe.
Récréation est le 40ème album virtuel du site drame.org, en écoute et téléchargement gratuits !