Comme le titre est en anglais on peut supposer qu'il n'a rien d'autobiographique en ce qui me concerne. Qu'ils soient professionnels ou amoureux, tous les divorces ne se passent pas aussi bien que les miens. Il suffit d'envisager la rupture au moment de la rencontre. Pas de cynisme, mais rien n'est certain, toute association est susceptible de s'interrompre un jour, ne serait-ce que par la disparition de certains protagonistes. Il me semble aussi que plus le mariage est chargé symboliquement, plus le divorce éventuel sera complexe. Les jeunes couples qui dépensent des fortunes pour marquer le coup n'auront souvent pas fini de payer les dettes contractées à cette occasion avant de se séparer ! Pour ma part je me suis marié deux fois le plus simplement du monde, sans aucun tralala, j'ai vécu dix et quinze ans de bonheur, et nous avons chaque fois divorcé à l'amiable, ce qui n'empêche évidemment pas la douleur de la rupture. Le mariage n'a rien à voir avec l'amour. Il s'agit seulement du regard de la société ou de se conformer à une loi facilitant ou pas le modèle familial. Je reste en bons termes avec presque toutes mes ex comme je l'écrivais il y a peu. Ce n'est hélas pas le lot de tout le monde. Au moins une fois j'ai vécu un enfer. Beaucoup s'entredéchirent, se font payer le déficit des années antérieures ou exhument les cadavres entassés dans les placards.
Hasse Poulsen semble avoir morfler un max ! Les années difficiles qu'il a passées avant de retrouver son indépendance lui auront au moins offert d'écrire un beau disque, certes amer, mais diablement prenant. Délivré du quotidien, au moment d'enregistrer les textes et la musique il ne l'était pas encore dans sa tête ou son cœur. Il est si douloureux d'accepter l'échec lorsqu'on s'est accroché à des futurs paraissant accessibles. Les lignes de fuite nous échappent, les parallèles finissant pas s'écarter à l'infini. Les paroles de ces 15 chansons sont terriblement justes et leur musique abstraitement bluesy. Combien de jours et combien de nuits à les ruminer avant d'accepter l'inéluctabilité de la rupture ? Il aura fallu beaucoup d'amour, de déceptions, de tentatives infructueuses pour s'y résigner. S'accompagnant seulement à la guitare, épaulé par le contrebassiste Henrik S. Simonsen, le batteur Tim Lutte et l'ingénieur du son Gilles Olivesi, le guitariste danois signe un album magnifique, digne des grands songwriters américains. Précisons que le Danois a une mère anglaise. Sur les photos de Denis Rouvre, Hasse Poulsen reste stoïque malgré le lait jeté à sa figure. Si celui-ci ne l'est déjà, on peut lui souhaiter que le prochain opus soit celui d'une renaissance, parce que la vie est faite de hauts et de bas, alternance de bonnes et mauvaises nouvelles, une course d'obstacles qui, au fur et à mesure que l'on avance, peut devenir de plus en plus facile à sauter, à moins de s'enfoncer dans le passé. Dans tous ses projets, y compris la collaboration que nous avons partagée sur La révolte des carrés avec Wassim Halal, Hasse Poulsen va de l'avant, remettant sans cesse son titre en jeu, car il n'est pire risque que de n'en prendre aucun.

→ Hasse Poulsen, Not Married Anymore, Das Kapital Records, dist. L'autre distribution, sortie le 18 octobre
→ concert du trio le 19 octobre au Triton, Les Lilas