Le titre de mon article se réfère évidemment à la Musique d'accompagnement pour une une scène de film (Begleitungsmusik zu einer Lichtspielszene) d'Arnold Schönberg (sur l'INA ou Deezer) pour laquelle Danièle Huillet et Jean-Marie Straub tournèrent jadis une remarquable Introduction cinématographique. Si le schéma opératique le plus courant est "exposition, action, catastrophe", Schönberg crée le drame sur la trame "danger menaçant, angoisse, catastrophe". L'économie de moyens déployée ici pour un résultat optimal est évidemment un modèle qu'il est aussi agréable qu'utile de suivre !
Comme je ne veux rien dévoiler qui ne soit officiel, je commence par regarder la conférence de presse des Rencontres d'Arles de la Photographie et je parcours la programmation. Me voici donc embarqué avec l'équipe de réalisation, Olivier Koechlin, Valéry Faidherbe et François Girard, pour une nouvelle aventure arlésienne. J'avais déjà occupé le poste de directeur musical des Soirées de 2002 à 2005, mais n'y étais pas retourné depuis. Si mon rôle tient du conseil, comme pour le "mano a mano" entre les agences Tendance Floue et Seven ou l'hommage à Roger Thérond, je mets la main à la pâte en sonorisant les dix ans du Prix Découverte et les autres, ou des expositions qui dureront tout l'été, comme celle de la photographe mexicaine Dulce Pinzon (La véritable histoire des super-héros, photo ci-dessus). Le reste est projeté sur écran géant au Théâtre Antique, avec musiciens en direct ou montage préenregistré. L'artiste JR clôturera la dernière soirée et je suis impatient de voir l'exposition consacrée à Chris Marker, de La jetée à son travail sur Second Life, dans le cadre de From Her On.
Sonoriser les montages photos est indispensable pour que le spectacle naisse, mais c'est un exercice difficile, voire dangereux. La rencontre de la musique et des images engendre de nouveaux sens qui ne doivent pas trahir les intentions des photographes. Lorsque je ne compose pas moi-même des originaux, j'essaie en général d'utiliser des œuvres peu connues dont les références ne handicapent pas le mariage arrangé tout en évitant l'illustration redondante. Je recherche donc les complémentaires en ayant à l'esprit l'effet produit sur les quelques 2500 spectateurs ! Il s'agit de créer le rêve ou la réflexion dans un temps très court, en surprenant, mais confortablement pour ne pas écraser les images. L'ensemble sonore doit faire œuvre, se tenir d'un bout à l'autre, tout en entretenant l'attention. Ce n'est pas toujours simple lorsque les sujets sont variés dans un même programme, ou les séquences extrêmement courtes, mais les enjeux sont stimulants. Pour l'instant nous en sommes à découvrir nous-mêmes les alliages magiques où l'intuition rivalise avec le synchronisme accidentel. Je plonge dans ma discothèque en grimpant le long des étagères, je bloque les dates des musicien(ne)s pressenti(e)s et savoure le travail de mes camarades réalisateurs qui mettent en forme la semaine de spectacles du 5 au 9 juillet prochains.