En Italie on cause, on cause, mais après ? C'est ce que raconte Lina Wertmüller dans Les Basilischi. C'est aussi comme cela que les Français caricaturent souvent les Italiens. Les Italiens, est-ce que cela existe vraiment ? L'unification du pays amorcée en 1861 a-t-elle jamais été assumée ? Ceux du sud sont toujours regardés comme des parias par ceux du Nord. Dans la petite ville provinciale de Minervino Murge, située entre les Pouilles et la Basilicate (qui donne son nom au film), les jeunes s'ennuient. Ils tiennent les murs, battent le pavé et rêvent des filles que leurs parents ne laissent pas sortir. Les préjugés, les clichés et les rituels les gardent prisonniers. Rome est un fantasme que peu transformeront en réalité, tant bien même, ils retournent au bled. Soixante ans plus tard, cette jeunesse laissée pour compte ressemble terriblement aux gamins français de nos cités. Ce premier film de Lina Wertmüller, sorti en France pour la première fois l'année dernière, laisse espérer que d'autres seront édités à l'avenir. Cette cinéaste rebelle, décédée à 93 ans en 2021, qui fut l'assistante de Fellini sur 8 1/2, est l'égale des plus grands. Sous une apparence néo-réaliste, on perçoit ce qui fera son style, un regard acéré sur les classes sociales, un grand écart qui mine les uns comme les autres. Comme Luchino Visconti di Modrone, Lina Wertmüller, née Arcangela Felice Assunta Wertmüller von Elgg Spanol von Braueich, entretient une sympathie fondamentale pour la classe ouvrière. Les Basilischi est une magnifique mise en bouche pour une œuvre épatante à découvrir ou redécouvrir. À noter que Vers un destin insolite sur les flots bleus de l'été, mon préféré, a déjà été publié par Carlotta.

→ Lina Wertmüller, Les Basilischi, Blu-Ray Carlotta, 15€, sortie le 22 août 2023