Impressionné par la violoniste Amaryllis Billet lorsque je l'avais découverte il y a huit ans au sein du Spat' sonore de Nicolas Chedmail, je ne suis pas si étonné d'entendre le duo Griffure qu'elle a fondé avec sa comparse, la violoncelliste Léonore Grollemund, un duo qui sort résolument de l'ordinaire. À l'époque, comme les autres spatistes, son instrument (électrique) est diffusé dans l'espace par de très longs tubes s'ouvrant sur des pavillons. Cette fois elle chante aussi, ou d'abord, comme Léonore Grollemund. Et ensemble elles se sont agrandies au trio avec l'électroacousticienne Undae, puis au sextet avec la violoniste Chloé Julian, l'altiste Alix Gauthier et la contrebassiste Léa Yèche, jusqu'à enregistrer l'album Paratonnerre. Nous y voilà. Et toutes ces filles chantent, du moins toutes les cordes. Frottées et vocales. Et ça vibre, avec moult ornementations. Et tout cela pouvant être transformé par l'électronique.
Amaryllis et Léonore sont parties des voix. Les cordes ont pris le pas sur les chansons. Les paroles sont sombres, mais la musique est claire. Pourtant, s'il faut un paratonnerre, c'est qu'il y a de l'orage dans l'air. L'onde est menaçante. Des murmures ensorcelants planent à la surface. Le chœur féminin s'efface devant l'eau verte avant d'entamer une valse légère ou un canon perturbé par la machine. On ne sait jamais qui du quintet à cordes ou du chœur céleste rappellera les mélodies d'antan pour les transformer en contemporaines menaces. L'ombre s'éloigne, laissant le modulateur en anneau rythmer la scène avant dissipation. Des histoires de filles. Des filles libres. Lyriques ou bruitistes, drôles ou graves, seules et ensemble. Des filles qui griffent.

→ Griffure, Paratonnerre, CD Umlaut, dist. Socadisc, 15€