C'est génial ou c'est nul. Je ne fais pas dans la demi-mesure. C'est froid ou c'est chaud. La tiédeur m'est étrangère. C'est oui ou c'est non. Dans Tristana de Buñuel, Catherine Deneuve hésite un instant entre deux pois chiches, mais elle finit tout de même par en choisir un. J'étais très jeune. Cette scène m'avait marqué. Pas la seule du film à m'avoir provoqué ! Il y a bien une ligne médiane, une bissectrice, une frontière sans no man's land, entre le plus et le moins. Le zéro est instable. Si l'on s'y arrête, ce n'est que le temps de choisir. Un temps oui, de l'espace aucun. Ensuite seulement s'interrogent les nuances. Elles sont nombreuses, autant que l'on peut en trouver dans le dictionnaire. C'est énorme. Dans mes articles, à de très rares exceptions près, je n'aborde que ce qui est au-dessus de la ligne, dans mes passions, enthousiaste, dans mes critiques, révolté. Rien de manichéen pourtant, je tempère. Je pèse mes mots. J'essaie de trouver le contresens, le double sens, le sens inverse, interdit, les bonnes raisons, les mauvaises aussi, sans excuse, juste comprendre, mais au bout du compte mon choix est fait. Il n'y a que deux colonnes à ma liste d'obsessionnel. Une troisième serait clandestine. Ceci dit, c'est sachant que "dans ce monde ce qui est terrible, c'est que tout le monde a ses raisons". Ce qui n'empêche qu'entre deux pois il y a deux mesures, et l'on peut toujours choisir. Sans regret, surtout sans regret. Parce que le regret renvoie au passé et l'on n'y peut rien changer. Par contre la responsabilité engage l'avenir, et personne ne nous oblige à nous entêter. Il y a tant de bêtises à faire, autant ne pas reproduire toujours les mêmes. Et puis parfois la frontière est infime entre le nul et le génial. Il suffit d'un rien. Sur le fil, du rasoir. Se figer en chemin et c'est la chute, mortelle. Garder l'équilibre. Un pas en arrière ou un pas en avant ? Vous ne me verrez jamais faire du sur place. Faut que ça bouge !