70 Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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jeudi 9 novembre 2023

Touché !


Sur son excellent blog, Beyond The Coda, Jean-Jacques Palix publie l’intégrale du manifeste de Radio NOVA de 1983.
La publication de ce Manifeste est un grand soulagement pour moi. Il s'appuie sur des dizaines de samples issus de la pièce "Crimes parfaits" d'Un Drame Musical Instantané publié sur le disque "A travail égal salaire égal" deux ans plus tôt. Je pratiquais ce type de montage radiophonique depuis mon film "La nuit du phoque" réalisé en 1974, film dans lequel jouait d'ailleurs Jean-Pierre Lentin. La boucle de Radio Nova qui passait préalablement la nuit intégrait déjà "M'enfin" de l'album "Rideau !", le précédent disque du Drame publié en 1980. Fadia Dimerdji est morte en 2015, juste avant de raconter comment avait été forgé le style de Radio Nova. Le Drame utilisait en outre des extraits de dialogues de film depuis 1977, dès son premier disque "Trop d'adrénaline nuit".
Quarante ans plus tard, cela fait chaud au cœur d'entendre ce document qui révèle comment les choses sont nées, témoignage extraordinaire de l'influence que j'ai pu avoir sur le style de Radio Nova que j'ai longtemps adoré, y reconnaissant souvent d'étonnantes concommittances.

Burroughs sur la piste Willner


Ecoutant Songs & Symphoniques - The Music of Moondog, excellente collaboration du Ghost Train Orchestra et du Kronos Quartet, je remarque que ce nouvel album est dédié à Hal Willner, comme le film Don't Look Up l'avait été il y a deux ans alors que mon producteur de disques préféré venait de mourir. Un mois après cet article du 4 octobre 2011, j'en remettrai une couche avec Littérature et musique pour ses albums autour d'Allen Ginsberg, Burroughs encore, Bob Homan, Edgar Poe...

J'ai suivi la piste Hal Willner, dans cette jungle peuplée de milliers d'albums. Un indice d'abord, le seul album sous son nom, bourré de samples de 78 tours des années 20, s'appelle Whoops, I'm an Indian. Reprendre la même recherche à intervalles plus ou moins réguliers ne produit pas les mêmes résultats. J'ai commencé en 1981 avec la compilation Amarcord Nino Rota avec Jaki Byard, Carla Bley, Bill Frisell, Muhal Richard Abrams, Steve Lacy, etc., et That's The Way I Feel Now: A Tribute to Thelonious Monk (1984) avec John Zorn, Peter Frampton, Dr John, Carla Bley, Steve Lacy, Randy Weston, Eugene Chadbourne, etc. De ce producteur spécialiste de compilations dont chaque contribution est un hommage, j'ai déjà évoqué ici Lost in the Stars: The Music of Kurt Weill (1985) avec Sting, Marianne Faithfull, Van Dyke Parks, Lou Reed, Tom Waits, Elliott Sharp, Charlie Haden, etc. et Weird Nightmare: Meditations on Mingus (1992) avec Bill Frisell, Vernon Reid, Henry Rollins, Keith Richards, Charlie Watts, Don Byron, Henry Threadgill, Gary Lucas, Bobby Previte, Leonard Cohen, Diamanda Galás, Chuck D, Elvis Costello sur des instruments de Harry Partch. J'aurais pu ajouter Stay Awake: Various Interpretations of Music from Vintage Disney Films (1988) avec Sun Ra, Sinéad O'Connor, Ringo Starr, Yma Sumac, Suzanne Vega, ou September Songs: The Music of Kurt Weill (1995) avec Nick Cave et P J Harvey... La distribution ressemble au trottoir de Sunset Boulevard ! Les étoiles apportent leurs tributs à l'édifice. Se succèdent Stormy Weather: The Music of Harold Arlen (2005), Rogue's Gallery: Pirate Ballads, Sea Songs, and Chanteys (2006), Harry Smith Project: Anthology of American Folk Music Revisited (2006) sans citer ses propres contributions à maints albums de ses invités... Il produit autant d'hommages live que d'étonnants albums, proposant aux artistes des rôles inattendus. Ses projets sont des remix inventifs où le passé et l'avenir se percutent en une série d'imprévisibles accidents. Ce chroniqueur encyclopédiste, jamais aussi bon qu'au service de ceux qu'il aime, dessine un portrait culturel de l'époque sans craindre de mêler les éléments populaires aux trucs les plus hirsutes.


En cherchant d'autres albums que son sublime travail sur Carl Stalling (avec Zorn en directeur artistique !) je tombe sur ses collaborations avec des écrivains, et en particulier deux albums avec William Burroughs, Dead City Radio (1990) avec un accompagnement de Sonic Youth, Donald Fagen, John Cale et d'autres, et Spare Ass Annie and Other Tales (1996) avec The Disposable Heroes of Hiphoprisy. Ah, que tous les amateurs de slam écoutent le flow de Burroughs, voix rugueuse et tranchante, portrait au couteau anticipant notre civilisation décadente, et le groove de Michael Franti et Rono Tse. Les citations classiques jouent les contrepoints en un mixage radiophonique pétillant d'à propos. J'ai commandé le premier, ainsi que The Lion For Real d'Allen Ginsberg avec Bill Frisell, Philip Glass, Paul McCartney, et deux autres CD contributifs, Leonard Cohen I'm Your Man et In With the Out Crowd de Bob Holman. En cherchant sur le Net on trouve la plupart pour moins de 8 euros. Closed on Account of Rabies (1997) d'Edgar Allan Poe avec Iggy Pop, Diamanda Galás, Abel Ferrara, Christopher Walken, Gabriel Byrne, Marianne Faithfull, Dr John, Jeff Buckley, semble plus dur à trouver à un prix raisonnable. J'aurais bien indexé chaque nom en hypertexte, mais il n'en resterait plus aucun qui ne soit pas souligné. Il serait temps de rendre hommage à son tour à ce touche-à-tout effervescent.